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Abi Khalil répond à ses détracteurs, soutenu aussitôt par Aoun

Zeina ANTONIOS 

Le dossier des deux navires-centrales, que l’État envisage de louer pour répondre à la demande grandissante en matière de courant électrique, continue de faire des remous. Le ministre de l’Énergie et de l’Eau, César Abi Khalil, s’est défendu hier face aux accusations d’irrégularité faites par les Forces libanaises et les Kataëb concernant le procédé relatif aux adjudications. Il était soutenu par le président de la République, Michel Aoun, qui a réitéré son engagement dans le combat contre la corruption.
C’est lors d’une réunion de la commission parlementaire des Finances et du Budget hier sous la direction du député Ibrahim Kanaan (Courant patriotique libre) que César Abi Khalil a répondu à ses détracteurs. Les FL et les Kataëb dénoncent le fait que le cahier des charges correspondant à l’opération des navires-centrales n’a pas été présenté à la Direction des adjudications.
« Nous avons balayé les mensonges lors de cette réunion », a déclaré M. Abi Khalil, ajoutant que le plan sur l’électricité allait permettre aux Libanais de faire entre 45 et 54 % d’économies. « Électricité du Liban (EDL) est une institution publique et jamais une institution publique n’a eu recours à la Direction des adjudications, et ce en conformité avec la loi libanaise, a-t-il dit. Si nous voulons assurer l’électricité pour cet été, nous ne pouvons pas lancer un nouveau cahier des charges qui prendra des mois de préparation. Voilà pourquoi nous avons décidé d’utiliser le cahier des charges élaboré par le gouvernement de Nagib Mikati, vu que la gouvernance est basée sur la continuité. »
Mardi, le ministre de la Santé Ghassan Hasbani (FL) avait dénoncé « l’appel d’offres qui a été lancé contrairement aux décisions du Conseil des ministres et aux règles en vigueur : le cahier des charges n’a pas été soumis au gouvernement ». « Plus encore : le ministère a eu recours pour l’appel d’offres à un vieux cahier des charges, qui avait été adopté par l’ancien gouvernement et en vertu duquel une transaction entachée de nombreuses failles juridiques et procédurales avait été effectuée », avait-il dit.
Le chef de l’État, Michel Aoun, s’est pour sa part une nouvelle fois dit déterminé à lutter contre la corruption, appelant toutefois à mettre un terme à ce qu’il a qualifié d’« accusations infondées », en réponse à ceux qui soupçonnent les camps aouniste et haririen d’avoir conclu un « marché » dans le cadre du dossier de l’électricité.
« Je dis aux Libanais : ne laissez pas le pessimisme vous envahir et ne croyez pas les rumeurs qui ont pour objectif de vous démoraliser, car notre volonté de lutter contre la corruption est inébranlable », a souligné M. Aoun, à l’issue d’un entretien au palais de Baabda avec une délégation du Conseil central maronite présidé par l’ancien ministre Wadih el-Khazen. « Que ceux qui ont des preuves précises sur des cas de corruption les présentent, sinon qu’ils arrêtent de tromper l’opinion publique », a prévenu le chef de l’État.

Une procédure « non respectée de A à Z »
Interrogée par L’Orient-Le Jour, une source judiciaire a pour sa part estimé que la procédure relative aux adjudications « n’a pas été respectée de A à Z ». « Selon la loi, toute adjudication de plus de cent millions de livres libanaises doit passer par la Direction des adjudications », souligne la source, sachant que les coûts relatifs aux nouveaux navires-centrales sont estimés, selon certains experts, à 850 millions de dollars par an.
La source dénonce également la composition du comité chargé de l’ouverture des plis, qui s’est réuni mercredi au siège du ministère de l’Énergie. « Ce comité doit être formé de fonctionnaires de l’administration publique concernée (EDL dans ce cas) ainsi que d’un inspecteur financier. Or, le comité était formé de conseillers du ministre de l’Énergie », a indiqué la source.
« Le litige est beaucoup plus important qu’une simple histoire de procédure. Il s’agit d’un conflit politique à portée économique. Un premier groupe politique pense que l’expérience des navires-centrales déjà loués (Fatmagül Sultan et Orhan Bey) n’a pas été concluante et qu’il est moins cher de construire des centrales. Un second groupe estime que les navires-centrales permettront de régler le problème plus rapidement. À mon avis, la solution est de respecter les procédures et les institutions », a ajouté la source.
Pour le chef des Kataëb, Samy Gemayel, le ministre de l’Énergie « n’a pas répondu aux questions relatives aux avantages économiques de la location, ni aux interrogations liées aux coûts élevés par rapport à d’autres pays ». « Les Kataëb vont poursuivre leurs efforts pour faire tomber cet accord et remédier à la manière dont le gouvernement traite le dossier de l’électricité », indique M. Gemayel dans un communiqué.
Même son de cloche chez le député Robert Ghanem, qui a dénoncé hier, à l’issue de la réunion de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice qu’il préside, « l’ambiance électrique lors de la réunion de la commission des Finances et du Budget à cause de l’électricité et des navires-centrales ». « Nous en avons loué il y a trois ans et nous ne savons pas combien cela a coûté ni si ces navires-centrales ont accompli leur mission puisque c’est une société non reliée au ministère de l’Énergie qui a supervisé leur travail », a-t-il souligné.