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Bkerké pourra-t-il trouver une solution à l’impasse présidentielle ?

Le patriarche maronite va-t-il réitérer son appel à l’adresse des quatre pôles maronites en vue de les réunir à Bkerké et les inciter à parvenir à une entente sur la présidentielle ?
L’idée serait de les exhorter à s’entendre sur un candidat choisi au sein du 8 ou du 14 Mars et même en dehors de ces formations. À défaut, le patriarcat pourrait tout au moins les pousser à réintégrer l’Assemblée pour élire un chef d’État. Et à renoncer par là même à la politique de boycott de l’hémicycle de sorte à laisser libre cours au jeu électoral dans l’espoir de voir surgir à l’issue du scrutin un favori qui ne se serait pas nécessairement porté candidat.
Une chose est certaine : ni Camille Chamoun ni Fouad Chéhab encore moins Sleimane Frangié n’auraient pu être élus si les députés avaient à l’époque exigé une entente préalable sur la personnalité à élire, et boycotté les séances électorales, une pratique déviationniste qui risque d’être érigée en règle.
Ainsi le Liban, qui fut l’un des premiers pays dans la région à appliquer la démocratie, est aujourd’hui impuissant à honorer cette pratique, au moment où certains pays arabes, qui ont connu des révoltes populaires, s’efforcent de plus en plus à aller dans cette direction.
Mais il s’agit d’abord de comprendre pour quel type de démocratie le Liban voudrait opter : la démocratie numérique ou la démocratie consensuelle à l’heure où le communautarisme bat son plein.
La réalité est que le pays du Cèdre a pratiqué une démocratie distordue du temps de la tutelle syrienne, dans la mesure où les élections parlementaires aussi bien que présidentielle se réduisaient à des nominations au nom d’un semblant de démocratie. Or, depuis le retrait des forces syriennes du pays en 2005, c’est une démocratie hybride qui est pratiquée : tantôt, l’on applique la démocratie numérique, lorsqu’elle convient à une partie politique donnée, tantôt, on passe à la démocratie consensuelle dès qu’elle arrange l’autre partie.
Preuve en est, la non-reconnaissance par les forces du 8 Mars des résultats des élections de 2005, puis de 2009.
Deux scrutins qui s’étaient conclus par une victoire du 14 Mars qui avait raflé la majorité des sièges. Une majorité considérée comme « non populaire » par le camp adverse. La minorité représentée par le 8 Mars a réussi alors à imposer ses desiderata à la majorité, refusant l’élection d’un chef d’État autre que consensuel, menaçant de provoquer un défaut de quorum. Elle a également exigé la formation d’un gouvernement faussement qualifié « de gouvernement d’unité nationale » réunissant la majorité et la minorité. Un gouvernement qui a outrepassé le Parlement en neutralisant son rôle pour ce qui est du contrôle de l’exécutif.
La raison en est simple : lorsque l’opposition et les loyalistes se retrouvent dans un même gouvernement, ils bloquent à eux deux le mécanisme de reddition de comptes dès qu’ils s’entendent et paralysent l’action du gouvernement lorsqu’ils ne sont plus d’accord, faisant payer au seul citoyen le prix de l’immobilisme de l’exécutif.
Aujourd’hui, les forces du 8 Mars reviennent une fois de plus à leur pratique ancienne de la démocratie consensuelle, insistant sur l’avènement d’un chef de l’État qui soit accepté par tous et refusant par conséquent l’élection d’un président par les voies constitutionnelles et démocratiques.
C’est la raison pour laquelle certains observateurs politiques estiment qu’une intervention de Bkerké est devenue nécessaire en vue de réunir les quatre pôles maronites pour les mettre devant leur responsabilité historique et nationale. Le patriarche devrait ainsi leur demander de faire acte de présence au Parlement pour élire un chef d’État et de parvenir, au moins, à s’entendre sur la modalité de l’élection au sein de l’Assemblée. Qu’ils ne soient pas en tous les cas ceux qui auront contribué à ce boycott fatal.