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Des bruits de bottes que le Liban ne risque pas d’entendre

Quand bien même elle continue d’alimenter la guerre verbale entre le 8 et le 14 Mars, la bataille du Qalamoun syrien n’aura eu à ce jour aucune répercussion inquiétante sur la scène locale libanaise. On convient qu’il est encore tôt de prédire les conséquences futures que cette bataille « stratégique » aux yeux des belligérants entraînera, mais il n’en reste pas moins qu’elle ne saura affecter outre mesure la stabilité interne. C’est ce que confie une source de sécurité haut placée, qui assure que « ni le dialogue ni la sécurité au Liban n’en seront pour autant affectés ». Une stabilité relative certes, mais qui tranche avec les bruits de canon et les batailles acharnées que se livrent dans le jurd du Qalamoun le Hezbollah et les soldats de Damas d’un côté, et les combattants islamistes coalisés au sein de l’Armée du Fateh el-Qalamoun de l’autre.

Les dernières informations en provenance du champ de bataille faisaient état du contrôle par le parti chiite de Tallet Moussa qui représente le plus haut point dans le jurd de Flita surplombant le jurd de Ersal du côté est. L’importance de ce sommet stratégique réside dans le fait qu’il permettra aux combattants du Hezbollah de contrôler le mouvement des jihadistes du côté est et de surveiller en même temps tous les points de passage illégaux reliant le jurd de Flita à Ersal tout en contrôlant les lignes d’approvisionnement.
Selon des observateurs qui suivent de près ces batailles, le Hezbollah, secondé par l’armée syrienne, aurait réussi à relier le Qalamoun à Damas, un objectif fondamental qu’aurait atteint le camp prosyrien. Citant des sources turques, un analyste affirme à L’Orient-Le Jour qu’Ankara aurait « conseillé » aux combattants islamistes de se retirer du Qalamoun, d’autant que ces derniers seraient effectivement en train de perdre du terrain ainsi que des hommes en grand nombre. Une source proche du Hezbollah explique d’ailleurs que le parti tente actuellement de grignoter du terrain sans chercher à élargir le périmètre de la bataille. Ses combattants tentent ainsi d’encercler les éléments islamistes pour leur laisser toutefois une issue de sortie et leur permettre de se retirer. Quoi qu’il en soit, cette bataille ne viserait pas tant à gagner du terrain qu’à marquer des acquis stratégiques permettant au parti chiite de protéger ses arrières et de sécuriser la frontière libanaise.

Autant de données qu’il est toutefois difficile d’étayer dans le cadre d’enjeux complexes où les deux parties se livrent une guerre psychologique en distillant les informations qui confortent le mieux leurs positions respectives.

Une chose est sûre : cette bataille, qui a précédé un échange virulent entre notamment le secrétaire général du Hezbollah et le chef du courant du Futur, ne devrait pas affecter outre mesure le dialogue entre les deux formations, qui reprendra comme si de rien n’était le 19 mai. Des sources informées croient savoir que le président du Parlement Nabih Berry compte d’ailleurs y mettre du sien pour consolider cette plateforme de rapprochement, en essayant de la pousser vers une formule plus constructive, moins vulnérable.

Parallèlement, la position affichée par l’institution militaire pour ce qui est de sa stricte mission de protéger les frontières libanaises (comprendre par là que la troupe ne saurait s’impliquer d’une manière ou d’une autre dans le Qalamoun syrien) a été réitérée samedi encore lors de la réunion du Conseil central de sécurité présidé par le Premier ministre, Tammam Salam. Une occasion pour le général Jean Kahwagi de réaffirmer que les soldats sont prêts à contrer toute agression contre le Liban, mais qu’ils ne comptent pas s’enliser dans le bourbier du Qalamoun. Cette prise de position – bien reçue par une grande majorité de Libanais – n’a pas manqué de susciter le courroux de quelques « sympathisants » du Hezbollah. Ces derniers se sont lâchés via les médias sociaux contre le commandement de l’armée, lui reprochant de se désolidariser de la résistance qui mène un combat transnational « pour et au nom du Liban, de son peuple et de sa souveraineté », comme le rappellent les députés du parti chiite.

Dans les milieux militaires, les certitudes sont inébranlables : l’armée veille et le Liban restera à l’abri des secousses d’une bataille qui fera plus de bruit que de mal en définitive.
L’affrontement du Qalamoun syrien n’aura pas non plus, semble-t-il, des effets sur les négociations avec le Front al-Nosra pour la libération des militaires otages. Selon des informations proches du dossier, les pourparlers auraient sérieusement avancé et le principe de l’échange serait acquis. Reste le mécanisme – comment effectuer l’échange, et un pays tiers devrait-il jouer le rôle de médiateur ? –, autrement dit des obstacles logistiques à mettre sur le compte du manque de confiance qui existe entre les deux parties, lesquelles ne devraient pas, en principe, remettre en cause les acquis marqués au niveau de ce dossier, assure-t-on.