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Des « martyrs » bien de chez nous, tués très loin de chez eux

 

Billet

 

Les corps des combattants du Hezbollah tués dans les affrontements qui les opposent au Front al-Nosra dans le Qalamoun syrien et à la frontière libano-syrienne, ou récemment contre le groupe État islamique (EI) dans le jurd du Qaa et celui de Ras Baalbeck, arrivent à la banlieue sud pour être enterrés en toute discrétion… si ce n’est les tirs de mitraillette et de roquette B7 dans les airs près du périmètre du parti chiite qui les trahissent.

Cet accueil populaire placé sous le signe des armes est devenu un rituel incontournable lors du transfèrement des dépouilles mortelles des combattants. Il se déroule le plus normalement du monde, parfois deux fois par jour ou plus, encadré par les soldats de l’armée en charge de la sécurité de la banlieue sud. Des détonations annonçant l’arrivée d’un nouveau « martyr » peu avant huit heures hier matin ont duré pas moins d’une demi-heure, terrorisant des citoyens hostiles à cette pratique devenue presque une tradition pour le Hezb. Une fréquence qui laisse deviner le nombre élevé de victimes, quand bien même les médias du parti en question ne sont pas particulièrement transparents sur le contexte dans lequel ces dernières ont disparu ou leur nombre exact. Une politique médiatique discrète en ce qui concerne les pertes humaines, mais qui est en contradiction totale avec la densité des tirs qui laissent leurs traces sur les voitures et dans la chair des citoyens. Ces morts ne laissent pas impassibles les détracteurs du parti chiite surtout, qui sont pleinement conscients que, encore une fois, ce sont de jeunes Libanais qui sont sacrifiés. Pire encore, loin de chez eux.
Ces « martyrs », comme les qualifie le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah, tombent pour la plupart en territoire syrien pour une double cause : défendre le régime de Bachar el-Assad et contrer le démon takfiriste, qui menace le Liban. Ces combats localisés et isolés dans lesquels interviennent les armées libanaise et syrienne de part et d’autre de la frontière avec, à cheval entre les deux, le Hezbollah, rendent le gouvernement libanais encore plus schizophrène. Ce cabinet essaye de préserver un tant soit peu cette fameuse distanciation, mais aussi une stabilité sécuritaire uniquement maîtrisée grâce à la volonté politique, le tout baignant dans un bain-marie régional en ébullition.

L’armée, dont des soldats sont encore détenus par le Front al-Nosra et l’EI depuis août dernier au vu et au su de toute la République, est dans l’expectative. Les tractations pour leur libération reportent indéfiniment l’espoir de prendre des mesures radicales qui permettraient de cicatriser définitivement cette plaie ouverte sur le flanc est du pays, transformé en déversoir pour les islamistes ainsi que pour les combattants en route vers l’arène syrienne.
Ce gouvernement, à l’instar de ses prédécesseurs, laisse faire et observe de loin toutes les manifestations armées du Hezbollah, exhibées dans la plus grande impunité sous le prétexte de la résistance contre Israël.