Jeanine JALKH | OLJ
Retour à la case départ. Aucune décision n’a émergé hier de la réunion du dialogue national, que ce soit en ce qui concerne le dossier des déchets ou celui du « profil » du futur chef de l’État, deux points de discussion placés hier à l’ordre du jour de la neuvième séance, sauf peut-être celle d’avoir fixé une date pour la tenue de la dixième séance, le 17 novembre.
L’assemblée s’est tenue au siège du Parlement, place de l’Étoile, en présence de toutes les composantes du paysage politique, à l’exception du parti Kataëb qui poursuit, depuis le 26 septembre dernier, son boycottage du dialogue « tant que la crise des déchets n’aura pas été résolue ».
Les caractéristiques requises du candidat présidentiel ont fait l’objet, comme à chaque fois, d’une discussion byzantine qui a occupé la majeure partie des échanges. Le camp du 8 Mars, et plus précisément le Hezbollah représenté par le député Mohammad Raad, a campé sur sa position, insistant pour que le futur chef de l’État avalise la logique de la résistance, avec son nouveau volet de lutte contre le terrorisme. Représentant le chef du bloc du Changement et de la Réforme, le général Michel Aoun, le député Ibrahim Kanaan a réitéré la nécessité du « recours au peuple » en ce qui concerne l’échéance présidentielle, le futur locataire de Baabda devant jouir d’une « large assise populaire ». Ont également campé sur leurs positions les composantes du 14 Mars, représenté par le chef du bloc du Futur, Fouad Siniora, qui a insisté sur la priorité à accorder à la politique de distanciation consacrée par le gouvernement de Nagib Mikati à l’égard du conflit syrien. M. Siniora a exhorté les participants à ne pas chercher « à ligoter les mains du futur président par des conditions préalables », surtout pour ce qui est de la question de la résistance, rappelant que la discussion autour des armes du Hezbollah s’inscrit dans le cadre de la stratégie de défense sur laquelle il faudrait convenir.
Bref, un dialogue de sourds qui se poursuit et se prolonge sans avoir porté ses fruits, à l’exception d’« un acquis unique », dira M. Mikati : « Le fait que nous allons continuer à nous retrouver autour de la table de dialogue. »
Les déchets
Les participants n’ont pas été plus productifs en matière de déchets, ce dossier ayant été débattu un quart d’heure durant sans aucun résultat. La nouvelle pierre d’achoppement était, cette fois-ci, la possibilité de l’établissement ou non d’une décharge sur le site Costa Brava, sur le littoral de Choueifat, face à la contestation exprimée par les locaux. À ce sujet, le député Talal Arslane a fait savoir que la question n’a pas été évoquée en détail. « La décision revient aux habitants de Choueifat, mais la meilleure solution serait l’exportation des ordures », a-t-il dit.
-
Arslane a demandé à Walid Joumblatt son « aide » pour pouvoir convaincre les habitants de Choueifat, avant d’essuyer un refus catégorique de la part du leader druze, qui lui a vivement conseillé de se faire aider par Akram Chehayeb. Le suspense n’aura pas duré longtemps puisqu’en soirée on apprendra que les habitants de la localité ont catégoriquement rejeté le projet, le refus ayant été répercuté par M. Arslane lui-même, qui a affirmé qu’une telle position a pour objectif « d’éviter la discorde ».
Ainsi, et face aux refus successifs exprimés tour à tour par les habitants des localités de Srar, puis de la Békaa suivis du Liban-Sud et hier de Choueifat, le dossier des déchets se trouve une fois de plus face à une sérieuse impasse (voir par ailleurs) dont une des issues pourrait être l’exportation des déchets, comme souligné par certains participants au dialogue.
Le député Hagop Pakradounian a indiqué que l’option de l’exportation se ferait de manière temporaire. Même son de cloche de la part du ministre du Tourisme, Michel Pharaon, qui s’est clairement dit en faveur de cette option qui, a-t-il précisé, fait actuellement l’objet d’une étude en termes de faisabilité et de coûts. « Nous ne pouvons plus attendre l’avis du moukhtar de Choueifat ou d’un autre pour nous décider. » Il a également fait savoir que « la région de la Quarantaine ne peut plus accueillir de déchets ».
M. Joumblatt, pour sa part, était le seul à affirmer que la réunion était « excellente », laissant toutefois planer le doute sur le sérieux de son propos.
À l’issue de la séance, un tête-à-tête a réuni le Premier ministre Tamam Salam et le ministre de l’Agriculture chargé du dossier des déchets, Akram Chehayeb, qui a exprimé sa surprise aussi bien à l’égard du choix du site de Costa Brava que de son rejet qu’il dit toutefois comprendre. M. Chehayeb n’a pas pour autant évoqué l’éventuelle alternative à ce nouveau revers.
Depuis le 17 juillet, date de la fermeture de la décharge de Naamé, le gouvernement n’a pas été capable de mettre en œuvre un plan pour gérer la crise des déchets. Une opération d’appel d’offres a été lancée avant d’être annulée fin août. Le ministre de l’Agriculture, Akram Chehayeb, a lancé début septembre un plan qui n’a toujours pas été mis en œuvre. Quant au Premier ministre, Tammam Salam, il continue de refuser de convoquer un Conseil des ministres sans accord préalable sur le plan Chehayeb qui doit faire l’unanimité avant son adoption.