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Droits de l’homme : la voie saoudienne

Il y a une semaine, l’on apprenait, grâce à l’ONG UN Watch, la nomination de l’Arabie saoudite à la tête d’un groupe consultatif au sein du Conseil des droits de l’homme de l’Onu. La nomination a eu lieu en juin, mais l’instance onusienne, probablement gênée aux entournures, s’était bien gardée de le crier sur les toits. L’une des missions de ce groupe consultatif, présidé par l’ambassadeur de Riyad auprès des Nations unies, Fayçal Trad, est de sélectionner des candidats du monde entier pour plus de 70 postes de rapporteurs spéciaux, qui travailleront pour le Conseil sur des dossiers allant de la détention arbitraire aux violences faites aux femmes.
L’actualité ayant plus d’un tour dans son sac, l’annonce de cette nomination intervient alors qu’un jeune opposant saoudien chiite, Ali Mohammad al-Nimr, pourrait être, dès jeudi, décapité puis crucifié en place publique. Selon certaines informations, il pourrait être ainsi exposé jusqu’au pourrissement de ses chairs. Ali Mohammad al-Nimr est accusé d’avoir participé en 2012, alors qu’il n’avait que 17 ans, à une manifestation contre le régime, d’attaque contre les forces de police et de jets de cocktails Molotov dans la région de Qatif, majoritairement chiite. Selon l’ONG Reprieve, qui assure la défense du jeune homme, c’est sous la torture que ce dernier aurait avoué. Aujourd’hui, seule une grâce royale peut épargner le pire à Ali Mohammad al-Nimr.
Quelques pays, dont la France et les États-Unis, ont appelé, en des termes mesurés, l’Arabie saoudite à surseoir à l’exécution d’al-Nimr. Le Canada, lui, a fait preuve d’une honnêteté rare, déclarant que la priorité allait à la garantie d’un contrat d’armement de 13 milliards de dollars sur 14 ans avec l’Arabie saoudite. Paris doit, lui aussi, vendre au Liban pour 3 milliards de dollars d’équipements militaires financés par Riyad, qui est, par ailleurs, le premier client des États-Unis en matière d’armes.
Depuis le début de l’année, le royaume wahhabite a exécuté 134 condamnés. Soit une exécution tous les deux jours et 44 de plus que l’an dernier, mineurs ou handicapés mentaux compris.
« Trop souvent, les affaires où l’accusé est passible de la peine capitale sont jugées en secret dans le cadre de procédures sommaires et iniques, sans que le prévenu ne puisse bénéficier d’une assistance ni d’une représentation juridique au cours des différentes phases de sa détention et de son procès. Les accusés peuvent être déclarés coupables uniquement sur la base d'”aveux” obtenus sous la torture ou d’autres mauvais traitements, sous la contrainte ou par la ruse », écrivait début septembre Amnesty International.
En prison, peut-être al-Nimr a-t-il croisé Raïf Badaoui, blogueur et militant saoudien qui, pour avoir appelé à la fin de l’influence religieuse dans les décisions du gouvernement, a été accusé d’« insulte à l’islam » et condamné à dix ans de prison et 1 000 coups de fouet. De manière générale, au royaume wahhabite, toute critique de la famille royale, des institutions religieuses et de l’islam est passible de poursuites.
Le régime sait toutefois se montrer flexible si nécessaire. Quand la stratégie effrénée de développement de La Mecque, où une énième tragédie vient de se produire, implique la destruction de la maison présumée de Khadija, première femme du Prophète, pour en faire des toilettes publiques, ou celle d’Abou Bakr, compagnon du Prophète, pour construire un hôtel au luxe tapageur, ou encore celle de la mosquée Bilal datant de l’époque de Mohammad, personne, dans les cercles du pouvoir, n’y voit là une insulte à quoi que ce soit…