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Gendre affairiste contre neveu puriste ?

L’ÉDITO

 

À l’heure où le Courant patriotique libre joue les trublions de la politique libanaise à un point inégalé dans l’histoire de cette formation et du Liban, contribuant à tous les blocages qui rendent ce pays ingouvernable quand ce n’est pas lui qui les initie carrément, les militants aounistes se préparent à une confrontation inédite, « à la maison » cette fois-ci.

Le 20 septembre prochain doivent se dérouler, en effet, des élections visant à désigner le successeur du général Michel Aoun à la tête du CPL, sans qu’il soit tout à fait clair, à ce stade, de ce qu’il adviendra du statut du fondateur après cette date.

Vu de l’extérieur des murs du courant aouniste, l’événement peut paraître surfait et inintéressant, surtout en ces temps de déliquescence des institutions, à l’ombre de laquelle la politique dégoûte, autant ou même plus que les ordures ménagères qui pourrissent sous l’écrasant soleil d’août.

Pourtant, on aurait tort de négliger l’importance que pourrait avoir cette échéance sur la façon de faire de la politique au Liban dans le futur, à condition toutefois que les protagonistes de la bataille veuillent bien jouer cartes sur table et débattre des vrais enjeux. Or hélas, rien n’est moins sûr.

Deux candidats s’affrontent, que tout, ou presque, oppose : d’une part l’omniprésent Gebran Bassil, collectionneur de portefeuilles ministériels et de… défaites électorales aux législatives, de l’autre le discret Alain Aoun, qui fut témoin plutôt qu’initiateur du changement radical de cap opéré par sa formation depuis 2005 et de son ancrage aux côtés du 8 Mars et de l’axe irano-syrien.

L’un est le gendre du fondateur, l’autre son neveu. De ce point de vue, les soupçons de népotisme s’appliqueraient, en théorie, à l’un et l’autre cas. Il reste que la préférence marquée du général à l’égard du premier indispose nombre de militants. De ce fait, ces derniers se rallient en masse à la candidature du second, une posture visant plus à préserver la virginité réformatrice du CPL, telle qu’ils la conçoivent, qu’à défier la volonté du chef.

Mais bien davantage que le népotisme, c’est l’affairisme attribué à l’actuel ministre des Affaires étrangères qui semble déranger les militants aounistes, sauf au Liban-Nord, où M. Bassil continuerait de bénéficier d’un avantage certain sur son concurrent. Presque partout ailleurs, Alain Aoun a actuellement le vent en poupe, ce qui pousse certains militants à exprimer des craintes pour la tenue du scrutin.

Quoi qu’il en soit, la campagne – c’est, en l’occurrence, un bien grand mot – paraît donc s’articuler autour de qualités et de défauts attribués un peu sommairement à l’un et l’autre des deux rivaux, plutôt qu’à des enjeux clairs. Et cela se déroule au milieu d’une absence quasi soviétique de transparence chez les cadres et députés de la mouvance. C’est dommage, sachant que les deux candidats ont, chacun de son côté, de la matière à opposer à l’autre. L’architecte de la politique de rapprochement du CPL avec le Hezbollah et l’axe irano-syrien qu’a été Gebran Bassil ne devrait-il pas saisir l’occasion pour défendre son bilan face à un Alain Aoun qui, lui, serait appelé à être fidèle à lui-même et prôner, sinon une remise en question de cette politique, du moins certaines corrections?

Du train où vont les choses, il n’en sera rien, apparemment. On le regrettera d’autant plus que cette échéance aurait pu aussi être l’occasion d’une réflexion sérieuse autour des méthodes du CPL, de ce populisme démagogique et outrancier duquel ne s’est jamais départi son chef.

Le changement et la réforme, ce n’est assurément pas encore pour demain…