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Jusqu’à quand la politique de l’attentisme ?

 

 

Après la prise de contrôle de Mossoul par l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL-Daech), des sources locales s’inquiètent des répliques que ce séisme politico-militaire en Irak pourrait provoquer au Liban. Pour le savoir, il faudrait avoir compris ce qui s’est vraiment passé, et comment une province irakienne entière a échappé au contrôle du pouvoir central de Nouri al-Maliki.

Deux jours après la surprise, on comprend mieux ce qui s’est passé, et sans l’aide de Leïla Abdel Latif. Ce sont tous les sunnites d’Irak qui ont rendu possible cette étrange victoire : les partisans de Saddam Hussein conduits par Izzat Ibrahim Douri, les militaires sunnites du Baas, les tribus sunnites et bien d’autres groupuscules sunnites jihadistes… Ce qui a également contribué à la capitulation de l’armée irakienne, c’est le fait que des soldats sunnites ont refusé de se battre, et ce n’est pas sans raison que Maliki a crié au complot.

Pour certaines chancelleries occidentales, ce qui s’est passé est rien moins qu’un renversement du régime irakien et une sanction de ses pratiques discriminatoires à l’égard de la population sunnite. L’une des conséquences immédiates de ce renversement de situation, c’est que l’Iran ne pourra plus user de la carte irakienne dans ses négociations sur le nucléaire, et que le régime syrien, après avoir pavoisé à la réélection de Bachar el-Assad, va devoir faire face à de nouveaux défis.

Cette redistribution des cartes concerne-t-elle le Liban ? Pour les observateurs politiques, le Liban n’est concerné que de loin par les répercussions immédiates du séisme jihadiste, dans la mesure où Beyrouth ne figure dans les préoccupations de personne, pour le moment, ni dans le sens d’un règlement de sa crise institutionnelle ni en direction d’une recrudescence immédiate du terrorisme jihadiste, que l’armée semble être parvenue, pour le moment, à juguler. Il y aurait lieu de s’inquiéter, bien entendu, si une « cinquième colonne » ou des « cellules dormantes » décidaient de se réveiller, et d’user du pays comme d’un pion sur l’échiquier régional.
Par quel hasard, se demandent certains, tous ces développements surviennent à l’heure où l’état-major israélien met en vedette l’énorme puissance de feu du Hezbollah, avec ses 11 000 fusées pointées sur Israël ?
Mais l’on se rassure aussi, dans les milieux politiques, de « l’ombrelle » offerte au Liban par la communauté internationale et de la volonté expresse des grandes puissances de tenir le Liban à l’écart des troubles régionaux… dans la mesure où il s’en garde lui-même.

Une bonne gestion de la vacance
Sur le plan politique, en effet, cette stabilité est fonction d’une bonne gestion de la vacance de la présidence de la République, pour ne rien dire de l’impasse législative persistante, des tiraillements qui se produisent en Conseil des ministres et de l’instrumentalisation des institutions pour obtenir des acquis politiques ou sociaux. Car dans ce cas, le « complot » ne viendrait pas de l’extérieur seulement, mais aussi d’une « cinquième colonne » occulte qui chercherait à provoquer la faillite du Trésor public, en préambule à un bouleversement institutionnel aux contours inconnus, marqué par un affaiblissement supplémentaire de la composante chrétienne du pouvoir.

Cela dit, dans les milieux du 8 Mars, on écarte pour le moment la possibilité d’une élection présidentielle. On se base, pour avancer cette idée, sur l’agenda suggéré par John Kerry, qui a laissé entendre aux malheureux alliés libanais des États-Unis qu’ils « ne doivent s’attendre à rien avant fin juillet »… à savoir, avant que l’Iran n’ait dit son mot sur les objectifs pacifiques de son programme nucléaire.
À moins que cette échéance ne soit reculée d’une nouvelle période de dix mois, et que d’un ajournement à l’autre, d’une redistribution des cartes à l’autre, leurs cheveux ne commencent à grisonner…

Bien entendu, les présidentiables n’ont pas à se résigner à cette fatalité ! Ils peuvent quelque chose pour eux-mêmes. Ils peuvent aussi faire preuve d’un peu de modestie, comme le leur demande le patriarche maronite. Les quatre candidats forts peuvent décider de se retirer et de devenir électeurs, et s’entendre sur une personnalité qui ne soit d’aucun camp – il en existe – et possède les qualités de chef requises pour oser mettre de l’ordre dans les écuries d’Augias.