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La mission de Hariri de plus en plus difficile…

Yara ABI AKL

Le président de la Chambre Nabih Berry a, une fois de plus, plaidé pour la mise sur pied d’un gouvernement d’entente nationale qui regrouperait toutes les parties et qui accorderait la priorité à la préservation de la stabilité du Liban, sur le triple plan politique, sécuritaire et social, insistant sur l’importance de l’élaboration d’une stratégie nationale de défense.
Selon des visiteurs de Aïn el-Tiné cités par l’agence locale al-Markaziya, le chef du législatif exerce un forcing pour la formation du cabinet, dans la mesure où la situation régionale est délicate et exige un gouvernement capable d’y faire face. Mais, en dépit des mises en garde de M. Berry, le processus de formation de la future équipe ministérielle semble buter encore sur plusieurs nœuds. Ceux-ci seraient notamment liés au désir de tous de prendre part au troisième cabinet Hariri.
C’est dans ce cadre que s’inscrivent les propos de Tony Frangié, député Marada de Zghorta. S’exprimant lors d’un dîner organisé par l’équipe de campagne électorale de son parti, M. Frangié a insisté sur ce qu’il a appelé « la victoire des Marada » lors des législatives. « En termes de chiffres, nous avons enregistré une victoire, d’autant que nous avons pu récupérer notre représentation dans le Koura (allusion à la victoire de Fayez Ghosn) », a-t-il lancé avant de poursuivre : « Nous réclamons une représentation conforme au poids de la Coalition nationale (un bloc parlementaire regroupant les Marada, Farid Haykal el-Khazen, Moustapha Husseini et des députés gravitant dans l’orbite du 8 Mars). »
M. Frangié a ainsi adressé un message politique fort au Courant patriotique libre (CPL). Fort de son bloc parlementaire de 29 députés, le parti de Gebran Bassil n’avait pas tardé à établir un lien direct entre l’effectif des députés de chaque parti et la qualité de sa présence au sein du prochain cabinet. Le parlementaire de Zghorta aurait ainsi tenté de garantir la représentation de sa formation dans la nouvelle équipe ministérielle.

Le tandem chrétien
Toujours sur le plan chrétien, le différend opposant le CPL aux Forces libanaises (FL), également articulé autour de l’envergure de chaque formation au sein de la Chambre issue des élections, semble loin de s’estomper. Et pour cause : le parti dirigé par Gebran Bassil semble toujours attaché à une représentation proportionnelle à l’effectif du bloc « Le Liban fort » qu’il parraine.
Contacté par L’Orient-Le Jour, Mario Aoun, député CPL du Chouf, affirme : « Nous avons facilité la formation du nouveau cabinet en demandant de se fier aux résultats des élections. » Critiquant implicitement le parti de Samir Geagea, M. Aoun fait valoir que le CPL tient à sa quote-part gouvernementale ainsi qu’à une autre qui devrait être accordée au président de la République Michel Aoun. Mais il fait, toutefois, état de son optimisme quant à une « formation ultrarapide » du cabinet, notant que des contacts sont actuellement en cours avec les FL.
Du côté de Meerab et en dépit de l’attitude « positive » adoptée à l’égard du parti fondé par le chef de l’État, on continue à insister sur « le respect des résultats des urnes ». C’est d’ailleurs à la faveur de cette logique qu’Antoine Habchi, député FL de Baalbeck-Hermel, a souligné, dans un entretien accordé à Radio-Liban libre, la nécessité de « respecter les choix des gens ». « Il y a une égalité des voix entre le CPL et les FL. Cela devrait se concrétiser au sein du gouvernement, dans le prolongement de l’entente conclue entre les deux partis », a-t-il ajouté. « Ce régime est celui qui nous importe le plus, et son échec signifie que nous avons échoué, dans la mesure où nous étions la composante à l’origine de son édification sur la base du concept de président fort », dans ce qui a sonné comme une réponse aux récentes accusations lancées par les aounistes selon lesquelles certains « voudraient affaiblir le régime ».

Pas de nœud druze
La querelle entre les deux partenaires chrétiens n’est pas le seul obstacle entravant encore la mise sur pied de l’équipe Hariri. Il y a aussi le différend opposant le chef du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt à son principal rival sur la scène druze Talal Arslane, chef du Parti démocrate libanais. Et pour cause : M. Joumblatt voudrait être représenté par trois ministres druzes dans le cadre d’une équipe de trente. Si certains expliquent cette position comme une tentative d’empêcher M. Arslane de faire partie du cabinet, les milieux de Moukhtara perçoivent les choses sous un autre angle. Joint par L’OLJ, Ghazi Aridi, ancien député de Beyrouth, met les points sur les i. « Il n’y a pas de nœud druze. Nous voulons que le critère “du plus fort” brandi par certains protagonistes soit appliqué à Walid Joumblatt. Et cela ne signifie aucunement que nous portons atteinte à M. Arslane », affirme-t-il, catégorique.
Quant à Saad Hariri, il poursuit ses contacts avec toutes les parties, pour reprendre les termes du ministre sortant de la Culture Ghattas Khoury (conseiller politique de M. Hariri), interrogé par la Voix du Liban 93.3. S’il est conscient de la nécessité d’aborder calmement la question épineuse du cabinet, selon des sources citées par al-Markaziya, M. Hariri (qui devrait effectuer plusieurs déplacements prochainement) serait encore indécis au sujet d’un ministre sunnite ne gravitant pas dans son orbite. Même si M. Khoury a tenu à noter que « le courant du Futur sera en principe le (seul) représentant de la communauté sunnite au sein du gouvernement ».