La situation
Le septième round de dialogue entre le Futur et le Hezbollah doit se tenir aujourd’hui à Aïn el-Tiné, à l’heure où les discours respectifs de Saad Hariri et Hassan Nasrallah, qui divergent sur le souci sécuritaire, inspirent la quiétude aux autres acteurs politiques, notamment les centristes.
Le principal dossier à l’ordre du jour restera en tout cas le dossier sécuritaire, traité sous les thèmes ambitieux d’une « coopération dans la mise en œuvre des plans sécuritaires au Nord et dans la Békaa », en vue de leur élargissement à Beyrouth et au Liban-Sud. Pour l’instant, cette coopération aura eu pour principal mérite d’assainir les rapports sunnites-chiites au niveau de la base, en misant surtout sur des initiatives symboliques, qui restent cependant de pure forme : le plan sécuritaire de la Békaa, privé de l’élément surprise, a été surtout marqué par la disparition préalable des fugitifs dans le jurd et en Syrie, preuve de la superficialité de la soi-disant coopération. Une autre marque de ce souci de renvoyer seulement une image d’apaisement est la suppression des slogans politiques et électoraux sur l’ensemble du territoire.
Autrement dit, tant que les deux parties sont d’accord sur le principe du maintien de la stabilité, nul besoin d’approfondir les rapports, surtout que les sujets de divergences ont été écartés d’avance de la table de dialogue.
S’il est un terrain animé, en dépit du blocage, c’est celui de la présidentielle, propice à toutes les gesticulations, fussent-elles répétitives ou vaines. Le Hezbollah a fait entendre hier, dans ce cadre, sa voix par le biais du député Nawaf Moussawi. Ce dernier a poussé plus loin l’appui officiel du parti chiite à la candidature du leader du Courant patriotique libre, le général Michel Aoun – comme d’habitude sans le nommer. Il a estimé en substance, sur base des failles de la loi électorale appliquée en 2009, que le schéma du Parlement actuel n’est pas représentatif du poids véritable de chaque partie politique. Selon lui, la conséquence en serait la suivante : la présidentielle ne saurait se fonder sur « le jeu du nombre », mais doit être tranchée par une entente sur un président chrétien fort. Moussawi justifie cette position par le fait de devoir adresser, par ce biais, un message fort indiquant l’attachement à la présence chrétienne en Orient face au terrorisme…
Cette position précède les échanges sur la présidentielle, qui doit ouvrir la voie du second volet du dialogue Hezbollah-Futur aujourd’hui. Mais ce dossier sera traité d’abord sous l’angle de la nécessité de préserver la marche du cabinet Salam, celle-ci étant la seule institution active à l’ombre de la vacance présidentielle et de la paralysie parlementaire. Le cabinet aura un an aujourd’hui. Néanmoins, respect de la coexistence oblige, le dialogue sunnito-chiite devrait préconiser une séparation entre les prérogatives du chef de l’État et celles des ministres, d’une part, et refuser tout usage détourné du mécanisme de l’unanimité dans la prise de décision au sein de l’exécutif, de l’autre. Ces deux considérations pourraient se retrouver dans la formule suivante : une prise de décision par consensus au sein du cabinet, qui exclurait l’exercice exceptionnel des prérogatives présidentielles, idée que défendent certains députés indépendants du 14 Mars. Cet équilibre devrait préserver le prestige de la présidence du conseil sunnite, ébranlée par les abus de « ministres-présidents », tout en empêchant de minimiser la gravité de l’absence – forcée – du président de la République maronite.
Pour ce qui est du dossier présidentiel au sens strict, il est prévu que les scénarios de déblocage proposés soient envisagés dès aujourd’hui par le Hezbollah et le Futur, notamment la proposition avancée par le chef du Rassemblement démocratique, le député Walid Joumblatt, et le président de la Chambre, Nabih Berry, de « rendre à l’échéance présidentielle son envergure nationale, puisque la limiter aux chrétiens risque d’ébranler le rôle fédérateur du chef de l’État ». Toutefois, aucun nom ne sera avancé pour l’instant dans les échanges entre le Hezbollah et le Futur.