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La parenthèse de la violence est refermée, pas celle des menaces…

Fady NOUN | OLJ

« Le Hezbollah est prêt à la guerre, mais ne la veut pas », a affirmé hier le secrétaire général du Hezbollah. De toute évidence, Israël, qui a toujours été « en danger de paix », ne veut pas non plus de la guerre à la veille de ses élections législatives. Côté israélien de la frontière sud, ont rapporté les agences, les agriculteurs s’occupaient hier de leurs vergers de pommier au plus près de la barrière frontalière, comme si l’attaque de jeudi n’avait jamais existé. Les deux camps pourraient donc se déclarer quittes devant le danger d’une escalade à laquelle personne n’a intérêt. Les règles de la proportionnalité de la réponse à la violence de l’attaque ont, visiblement, été respectées, comme l’a souligné le secrétaire général du Hezbollah. « C’était plus qu’une attaque et moins qu’une guerre », a-t-il confirmé.

Ainsi, la parenthèse de la violence est (provisoirement) fermée. Mais pas celle des menaces. L’armée israélienne a dit considérer ces événements comme les plus graves depuis la guerre de 2006 avec le Hezbollah. « Ceux qui sont derrière l’attaque en paieront le prix », a promis le Premier ministre Benjamin Netanyahu. « Toute atteinte à nos miliciens sera considérée comme étant le fait d’Israël, et nous y répondrons », a répondu, menaçant, Hassan Nasrallah, qui a déclaré caduques les « règles d’engagement » antérieures entre son parti et Israël, en se promettant de répondre aux attaques israéliennes sur le front de son choix ; sachant qu’il a déjà changé la fameuse règle du jeu en répondant à une attaque en Syrie par une attaque au Liban, tout comme l’avait fait Israël en attaquant en Syrie le Hezbollah libanais.

« Où allons-nous ? Dans quelle aventure nous embarque encore le Hezbollah ? » se sont interrogées en substance des forces politiques libanaises hostiles à l’axe syro-iranien, le jour même où le légendaire général Qassem Suleimani se trouvait au Liban pour saluer la mémoire des six combattants du Hezbollah assassinés dans le Golan.
C’est que « Hassan Nasrallah est meilleur tribun que stratège », pensent ces forces, et que sa politique du bord du gouffre, qu’il a risquée une première fois en juillet 2006, a été catastrophique pour le Liban, et qu’une autre erreur stratégique de cet ordre serait, cette fois, fatale au pays du Cèdre.

Pour sa part, Fouad Siniora n’a pas laissé échapper l’occasion de la présence au Liban du général iranien pour condamner l’aventurisme du Hezbollah et rappeler que l’usage de la force est du ressort exclusif de l’État. Ce faisant, l’ancien Premier ministre a pris le contrepied de la tonalité relativement conciliante adoptée officiellement par le courant du Futur à l’égard du Hezbollah depuis le début du dialogue entre les deux formations, se montrant très sévère au sujet de l’opération anti-israélienne menée par le parti chiite. Une fois de plus, a-t-il expliqué en substance, ce sont deux logiques contradictoires, difficilement conciliables, qui se heurtent au Liban, et il ne fait pas de doute que l’une devra nécessairement triompher de l’autre.
Certes, il s’est trouvé hier des politiciens faussement naïfs, comme Élie Ferzli, pour affirmer, sur la parole de Hassan Nasrallah, que le Hezbollah ne prend pas ses ordres de l’Iran, mais pour d’autres, comme Farès Souhaid, il est clair qu’en affirmant vouloir changer les règles du jeu, le Hezbollah enterre en fait la résolution 1701 de l’Onu. Au vu des développements régionaux, on a tendance à le croire, et cela n’est pas loin d’être un pas vers la guerre.

Que fait-on, entre-temps, pour les institutions au Liban? Rien ! Pour Marwan Hamadé, le gouvernement n’est plus qu’un « conseil municipal ». Le Casino n’est plus qu’un campement. Électricité de Zahlé, un camp de tir…
Quant au dialogue devant conduire à l’élection d’un nouveau président de la République, les Forces libanaises, en pleine catharsis, l’ont provisoirement « oublié ». C’est à se demander ce que vient faire Jean-François Giraud la semaine prochaine au Liban ? Le directeur du département Moyen-Orient-Afrique du Nord au Quai d’Orsay est attendu au début de la semaine prochaine, en mission d’information de deux jours. Il trouvera Cendrillon endormie. Est-ce donc de cela que l’ambassadeur Patrice Paoli s’est entretenu hier avec Gebran Bassil, au palais Bustros ?

Comme il faut bien espérer et se fixer des horizons réalistes, la classe politique a décidé de charger de sens positif l’intervention attendue de Saad Hariri pour le 14 février, date de l’assassinat de son père en 2005. On a l’espoir qu’on peut.