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L’accord sur le nucléaire, sérieux levier pour débloquer la présidentielle libanaise  

L’éclairage

Philippe Abi-Akl

L’accord américano-iranien sur le nucléaire, scellé hier après plusieurs mois de négociations laborieuses, marquera le début d’une nouvelle ère au Moyen-Orient. C’est, du moins, ce que pensent des diplomates en poste au Liban qui s’attendent à ce qu’un dialogue sérieux soit engagé dans un second temps entre les acteurs internationaux et régionaux pour essayer de régler les nombreuses crises qui secouent la région, suivant un agenda définissant les priorités.

Les chefs de la diplomatie américaine, John Kerry, et russe, Serguei Lavrov, doivent tenir sous peu une réunion de concertations pour évaluer l’étape suivante et essayer de définir les priorités sur base desquelles chacun engagera des tractations dans une tentative d’éteindre les feux qui consument la Syrie, l’Irak, le Yémen et la Libye notamment.
Bien qu’il ne figure pas en tête des priorités de la communauté internationale, le Liban fait partie des dossiers dont le règlement est prévu dans la foulée de l’accord sur le nucléaire. Un diplomate libanais croit ainsi savoir que Washington et la France, secondés par la Russie et le Vatican, entendent conjuguer leurs efforts pour obtenir un déblocage de la présidentielle. De même source, on estime qu’un éventuel déblocage devrait être une preuve de la bonne foi iranienne, Téhéran étant en mesure d’obtenir de son allié local, le Hezbollah, qu’il facilite l’élection d’un chef de l’État et qu’il s’efforce de convaincre le Courant patriotique libre (CPL) de l’importance d’une entente autour d’un candidat de compromis. Un effort similaire devrait être fourni en direction de l’Arabie saoudite, qui est loin de se réjouir de l’accord sur le nucléaire, pour favoriser l’élection d’un candidat consensuel qui serait agréé par toutes les parties.
Dans ce contexte, on s’attend à une reprise des visites d’émissaires français à Riyad et à Téhéran pour rouvrir le dossier de la présidentielle libanaise. Selon une source diplomatique occidentale, les pourparlers à ce stade seraient plus « clairs et iraient au-delà du “wishfull thinking” », à savoir des vœux pieux exprimés par Paris pour l’élection d’un président. De même source, on affirme que les médiateurs français insisteront sur « un rôle positif iranien » et qu’ils n’accepteront pas que l’Iran les renvoie encore une fois aux acteurs locaux, notamment chrétiens. Ce même diplomate rappelle qu’en 2013, il avait été possible de profiter d’une conjoncture régionalo-
internationale favorable pour exercer des pressions sur Téhéran afin qu’il favorise la formation d’un gouvernement après la désignation de Tammam Salam. Les conditions aujourd’hui sont presque similaires, selon ce diplomate qui relève que plusieurs responsables occidentaux, notamment le secrétaire d’État américain, scrutent le rôle de l’Iran et espèrent un déblocage au Liban avant le mois de septembre.

Dans le cas contraire, ce diplomate n’exclut pas un durcissement de la position occidentale, qui se traduirait par une certaine retenue, voire des réticences à lever les sanctions économiques et militaires contre l’Iran, cette mesure étant prévue comme on le sait de façon graduelle dans l’accord sur le nucléaire. Une source politique locale se montre cependant optimiste en estimant que l’Iran postaccord est différent de l’Iran d’avant l’accord à partir du moment où le courant modéré dirigé par le tandem Rohani-Zarif – le président Hassan Rohani et le chef de la diplomatie, Mohammad Javad Zarif – et soutenu par le guide de la République islamique a réussi à arracher aux États-Unis un accord sur le nucléaire et à créer en Iran une nouvelle donne de nature à affaiblir le courant des conservateurs dirigé par les gardiens de la révolution, et à introduire de ce fait des changements radicaux au niveau de la prise de décision. Pour elle, au Liban, cela se traduirait par un déblocage de la présidentielle.
De même source, on n’exclut pas un bras de fer dans les mois à venir entre les deux courants modéré et conservateur iraniens, d’autant qu’une importante partie du peuple soutient la politique suivie par le président Rohani.