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L’armée poursuit son déploiement à Qaa et à Ras Baalbeck

« L’armée est déployée en masse depuis jeudi et des renforts sont arrivés hier tout au long de la journée. J’espère que l’attaque contre les miliciens de Daech sera imminente », s’exclame Rifaat Nasrallah, un ancien militaire originaire de Ras Baalbeck, qui, depuis plus de trois ans, fait partie des hommes ayant pris les armes au village pour monter la garde contre les fondamentalistes du groupe État islamique (EI).
« Ils sont à 7 kilomètres de chez nous. Les combats de Ersal ont libéré une partie du jurd des miliciens du Fateh el-Cham (ex-Front al-Nosra), à 25 kilomètres de Qaa et de Ras Baalbeck (villages exclusivement chrétiens de la frontière est). Le danger imminent qui pèse sur nos deux localités, ce sont bien les miliciens de l’EI. Il faudra que l’armée nous débarrasse d’eux une fois pour toutes », se plaint-il dans un entretien téléphonique à L’Orient-Le Jour. Hier, l’armée libanaise a d’ailleurs bombardé les positions des jihadistes de l’EI sur les hauteurs de ces deux localités. La troupe aurait reçu l’ordre d’intensifier ses bombardements dans les heures à venir.
Le père Élias Nasrallah, responsable de la paroisse de Qaa, estime de son côté que « la bataille est imminente. Nous attendons ce moment depuis des semaines, des mois, des années… Je pense que ce n’est plus qu’une affaire de quelques heures », soupire-t-il, presque soulagé, s’empressant de rendre hommage « à l’armée libanaise et la résistance ».
Qaa, village de 4 500 habitants, compte 35 000 réfugiés syriens à sa frontière. L’année dernière, la localité a été le théâtre en une journée de plusieurs attentats-suicides qui avaient fait 5 tués et des dizaines de blessés. « Un peu plus d’un an plus tard, on ignore toujours si les kamikazes étaient sortis de ces camps, étaient venus du jurd, ou avaient tout simplement franchi la frontière », confie-t-il, au téléphone, à L’OLJ.

Visite de terrain
Les militaires libanais en poste à Ersal, une localité exclusivement sunnite de la frontière est, ainsi qu’à Qaa et à Ras Baalbeck, ont reçu la visite hier du chef d’état-major de l’armée, le général Hatem Malak, qui a inspecté diverses positions de la troupe.
Le général Malak, qui a rendu hommage aux soldats, a souligné que « les militaires protègent aussi bien les Libanais de ces villages reculés que les réfugiés syriens qui s’y trouvent ». Il a également affirmé que « la troupe poursuivra son combat contre le terrorisme jusqu’à la libération de toute la frontière est ».
Il semblerait, selon divers experts, que c’est l’armée qui mènera la bataille contre les miliciens de l’EI à Qaa et à Ras Baalbeck. Le général à la retraite Khalil Hélou a rappelé, hier, dans un entretien à l’agence al-Markaziya, que, « depuis plus de trois ans, la troupe se trouve à l’orée de ces deux villages afin de les protéger de toute infiltration provenant du jurd ». Selon lui, l’intérêt primordial de l’armée serait de renforcer les positions qu’elle tient déjà dans la région, en prenant quelques collines aux mains des jihadistes, même si la troupe est pleinement capable, en théorie, de mener avec succès une offensive contre l’EI. Il reste, souligne-t-il, que l’EI est déployée sur 300 à 400 km², dont les deux tiers sont en territoire syrien. Qui plus est, dans le cas de Ersal, des négociations existaient entre le Hezbollah et le Fateh el-Cham, bien avant la bataille du jurd. L’offensive du Hezbollah ne représente que l’échec retentissant de ces négociations, dit-il, « jusqu’à l’intervention réussie du directeur général de la Sûreté, le général Abbas Ibrahim, qui a calmé la situation ». « La nature et la tactique du combat qui pourrait avoir lieu dans le jurd de Qaa et de Ras Baalbeck seraient différentes », a-t-il ajouté, dans la mesure où l’EI ne négocie pas, ses miliciens étant disposés à aller jusqu’au bout.
Khalil Hélou note, par ailleurs, que la bataille de Ersal va à l’encontre de la politique de distanciation adoptée par le Liban officiel, ce qui n’empêchera pas le parti chiite de l’exploiter sur le plan interne libanais. Le député du bloc de la Fidélité à la résistance, Hassan Fadlallah, affirmait d’ailleurs hier soir, lors d’une cérémonie funèbre près de l’AIB, que « la victoire obtenue lors de la bataille du jurd de Ersal avait jeté les fondements d’une nouvelle période de stabilité, née grâce au triptyque en or armée-peuple-résistance ».

Abbas Ibrahim
De son côté, le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, a indiqué hier que l’accord de cessez-le-feu, conclu jeudi matin entre le Hezbollah et les jihadistes du Front Fateh el-Cham qui se trouvent encore dans le jurd de Ersal, était mis en œuvre comme convenu.
« Tout se passe comme prévu en ce qui a trait à l’accord. Sa mise en œuvre se déroule conformément aux modalités sur lesquelles l’ensemble des parties se sont accordées », a déclaré le général Ibrahim à la chaîne du Hezbollah, al-Manar.
Selon al-Markaziya, les négociations menées par le général Ibrahim ont mené à une entente entre le Hezbollah et Fateh el-Cham. Ainsi, les miliciens du Fateh el-Cham et les réfugiés syriens qui le désirent pourraient quitter le jurd de Ersal pour Idleb, en Syrie. En contrepartie, la milice sunnite devrait libérer des prisonniers du Hezbollah et de l’Iran, et rendre les dépouilles mortelles de leurs miliciens tombés en Syrie.