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Le CDR pris la main dans le sac… poubelle ?

 

La situation

Fady NOUN

Le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) était au centre des débats du Conseil des ministres réuni hier au Grand Sérail, et en a peut-être fait les frais, non pas directement, mais à travers des anomalies relatives à l’adjudication de la gestion des déchets dans la décharge de la Costa Brava.

Dans les faits, à l’issue de la réunion, le ministre de l’Information, Ramzi Jreige, a annoncé qu’il a été décidé de demander à cet organisme de fournir, dans un délai d’un mois, un plan détaillé de la méthode qu’il adopte pour sélectionner et exécuter les projets dont il est chargé.
Inversement, tous les ministères ont été sollicités d’informer le CDR, dans un délai de 15 jours, des projets en cours d’exécution et de ceux qui l’ont été depuis 2008 et qui avaient été retirés au CDR pour être exécutés directement par les ministères.
À l’issue de la réunion, le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a jugé « impensable » que l’exécution de 81 % des projets de l’État soient confiés au CDR, déplorant « l’absence de critères » concernant le choix des projets.

Supervision
Flairant des irrégularités, le ministre de l’Éducation, Élias Bou Saab, a demandé pour sa part au Premier ministre, Tammam Salam, de former une commission chargée de superviser le travail du CDR. Il a précisé ne pas avoir obtenu gain de cause et s’est résigné à attendre le rapport du gouvernement, censé se prononcer sur les performances de cet organisme dans un délai d’un mois.
Notons que le ministre du Travail, Sejaan Azzi, « démissionné » par son parti, puis radié des Kataëb pour avoir contesté une décision prise sans qu’il ne soit consulté, s’est présenté au Grand Sérail et a affirmé qu’il assiste « à titre personnel » au Conseil des ministres « en tant que représentant de mes idées, de mes principes, de ma ligne politique nationale, maronite, chrétienne et même phalangiste ». M. Azzi a critiqué le manque de ressources allouées au Mont-Liban (voir plus bas).
À l’issue de sa séance, le gouvernement a décidé qu’il se réunira à nouveau la semaine prochaine, mardi et jeudi, dans le cadre de ce qui a été considéré comme « un nouveau départ » du travail gouvernemental, qui prévoit désormais deux réunions par semaine, l’une pour l’examen de l’ordre du jour ordinaire, l’autre pour l’examen de dossiers particuliers.

Le CDR se ravise
Le dossier de la gestion des déchets n’a pas été abordé hier en Conseil des ministres, mais il est revenu sur le tapis par le biais d’une polémique déclenchée en matinée autour de l’appel d’offres pour la décharge sanitaire de Costa Brava, et qui donne la mesure de la corruption marquant ce secteur.
C’est ainsi que le Conseil du développement et de la reconstruction a annoncé hier matin dans un communiqué que l’appel d’offres pour la construction de la décharge sanitaire de Costa Brava, censée accueillir une partie des déchets ménagers de Beyrouth et du Mont-Liban, remporté le 27 mai par une compagnie appartenant à l’homme d’affaires Jihad el-Arab n’était qu’un « accord de principe » convenu en attendant que soit fixé le prix pour l’appel d’offres relatif à la décharge prévue à Bourj Hammoud.
Et le CDR d’ajouter que son conseil a décidé le 23 juin, à l’unanimité, d’annuler » l’accord de principe « avec la société de Jihad el-Arab, al-Jihad for Commerce and Contracting SAL, en raison de la différence de prix entre l’offre pour Costa Brava et celle pour Bourj Hammoud, nettement moins chère.

Les « vérités cachées »
Le commissaire du gouvernement près le CDR, Walid Safi, interrogé hier matin par L’Orient-Le Jour, a toutefois remis en cause le communiqué du CDR, qu’il a qualifié d’ « inexact ». M. Safi a assuré avoir reçu dès le 22 juin le contrat relatif à la décharge de Costa Brava afin de le signer et de le transférer au Conseil des ministres. Il précise cependant avoir refusé de signer ce contrat, en raison de l’écart entre les prix figurant dans ce contrat et leurs répondants dans le contrat de Bourj Hammoud présentés par la société Dany Khoury.
« Ils (le CDR) essaient de faire croire qu’ils sont à la base de la remise en cause du contrat, mais c’est faux », a confié Walid Safi à L’OLJ, faisant état de « très importants écarts de prix entre les deux appels d’offres, non seulement par rapport au coût de traitement et d’enfouissement de la tonne de déchets (10 dollars/tonne d’écart, pour l’enfouissement ; 13,5 millions de dollars vs 24 millions par unité d’espace de traitement !), mais aussi pour ce qui est de la construction de brise-lames dans les deux sites ».
Walid Safi a réclamé le retrait du communiqué publié vendredi par le CDR, faute de quoi il a menacé de révéler « beaucoup de vérités cachées » sur les appels d’offres organisés par le Conseil.
Avant la réunion du Conseil des ministres, Waël Bou Faour (PSP), ministre de la Santé, avait affirmé à la presse qu’il « n’acceptera pas que l’argent public soit dilapidé », précisant qu’il avait exposé au Premier ministre les « défauts » entachant l’adjudication de la gestion des déchets à la Costa Brava.