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Le massacre de Qalb Lozé réveille la convivialité endormie ; Kahwagi mise sur la transparence

 

La situation

Fady NOUN

 

Sagement qualifié d’incident isolé par Walid Joumblatt, le massacre d’une vingtaine de druzes par un cacique d’al-Nosra, dans le village syrien au nom si poétique de Qalb Lozé, n’éclipsera pas longtemps la crise interne, comme il l’a fait hier. Dommage, car ce qui pointe, dans l’unanimité interne à dénoncer un malheur qui atteint l’une des communautés, c’est le Liban profond, le Liban de la politesse et de la politesse en retour, le Liban d’une précieuse culture de la civilité qui peut facilement reprendre ses droits, quand les passions s’apaisent. Et que les télévisions se taisent.

Le contraste si vif entre les réactions de Walid Joumblatt et celles de Talal Arslane et de Wi’am Wahhab trace la frontière entre le sang-froid et la soif de vengeance. Du reste, cette frontière, c’est le simple bon sens dont le chef du PSP sait faire preuve qui la trace, quand il constate tranquillement que sa communauté ne peut pas s’aliéner un peuple syrien qui appartient à 75 % à la communauté sunnite.
Mais il ne semble pas dans l’intention de Michel Aoun de retenir cette leçon de pondération, puisque sur les réseaux sociaux, des appels à un large rassemblement devant son domicile, à Rabieh, sont lancés pour le 21 juin.
En revanche, le Premier ministre Tammam Salam se garde d’exacerber la crise gouvernementale et s’accorde deux semaines de répit, avant de convoquer à nouveau le gouvernement. M. Salam se rend mercredi prochain en Égypte, pour y rencontrer le président Abdel Fattah al-Sissi.

Indigné, le patriarche Béchara Raï a dénoncé une fois de plus les « fautes morales » dont se rendent coupables les hommes politiques qui, par leur conduite et leurs décisions, nuisent au bien commun, creusent les inégalités économiques, plongent les gens dans la gêne et la misère ou mettent le pays en danger, dans la recherche de leurs intérêts propres.

Le moral de l’armée
Mettre le pays en danger, en sapant le moral de l’armée, voici la légèreté que le général Jean Kahwagi reproche à ceux qui mènent campagne pour la nomination, dès aujourd’hui, d’un nouveau commandant de l’armée, alors même que la troupe, tendue comme un arc, est en pleine bataille sur le front oriental, face au takfiristes de Daech. Il l’a dit hier au président de la Chambre, Nabih Berry, qu’il a vu à Aïn el-Tiné, comme il l’avait dit la veille au Premier ministre, qui lui rendait visite à Yarzé, comme il l’a répété dans un entretien accordé au quotidien as-Safir. « Ce qui assure à une armée la victoire, a-t-il dit, plus que les chars, les avions, les fusées et l’artillerie, c’est d’abord un moral à toute épreuve qui peut même suppléer à l’absence d’armes sophistiquées. » Et d’insister pour que l’armée soit mise à l’abri des ingérences et des tiraillements internes, et que la désignation d’un nouveau commandant en chef ne soit pas débattue sur la place publique.
Selon le général Kahwagi, qui mise sur la transparence, l’armée contrôle absolument toutes les voies qui conduisent de Ersal vers le « jurd », et il est « impossible » que les groupes armés y pénètrent ou étendent leur emprise sur la ville.
Et le général Kahwagi d’ajouter qu’une force de 750 hommes a pénétré à Ersal, il y a quelques jours, et en a inspecté les quartiers, mais que son installations permanente dans la localité n’est pas envisagée pour le moment, et ne le sera que lorsque l’armée constatera que les conditions en sont réunies.

On assure, de source informée, que l’armée combine adroitement en ce moment l’action militaire à l’action sécuritaire préventive, et que cette dernière méthode est bien moins coûteuse et souvent tout aussi efficace. C’est ainsi qu’on a appris hier l’arrestation d’Ahmad Abdallah el-Atrache, surnommé « l’aigle de Ersal », un homme que l’armée considère comme impliqué dans l’explosion de voitures piégées à Hermel, et qu’elle soupçonne d’avoir acheminé d’autres véhicules piégés vers la banlieue sud de Beyrouth.
On annonçait aussi, hier, que l’armée se trouvait en force près du camp de réfugiés syriens Marj, dans la Békaa, où des perquisitions et des vérifications d’identité avaient cours, parallèlement à des recherches semblables dans le camp de Anjar.
Le Liban est « bien tenu » sur le plan de la sécurité, par rapport aux pays du voisinage, a assuré le général Kahwagi dans son entretien, et les Libanais devraient rendre grâce pour cette bénédiction, au lieu de la compromettre à la légère.