Site icon IMLebanon

Le pire est-il à venir ?

 

Clamer que c’est hallucinant, c’est peu dire, affirmer que c’est incompréhensible et franchement ubuesque, c’est rester bien en deçà de la réalité. Du sud au nord, d’est en ouest, les gens meurent, sont assassinés, sont enlevés, sont réduits à la fonction humiliante de monnaie d’échange, et pourtant personne ne semble en mesure d’en tirer les conclusions, personne ne se décide à remettre en question d’anciennes certitudes, des convictions balayées par les malheurs du temps.
Les dénonciations, bien sûr, sont nombreuses, les promesses sont véhémentes et répétitives et les conciliabules et autres « concertations urgentes » sont médiatisés à outrance, mais cela s’arrête là. L’insécurité se déplace de région en région, les accrochages sanglants et embuscades meurtrières font une pause dans la Békaa pour mieux reprendre au Nord, les militaires continuent d’être agressés, d’être pris pour cibles par les disjonctés du jihadisme, les parents des victimes, eux, sont toujours menés en bateau, subissent mensonge sur mensonge et l’opinion publique n’y voit toujours que du feu…
En toile de fond, le spectacle est immuable : une présidence aux abonnés absents, un Parlement en hibernation prolongée et un gouvernement pieds et poings liés dont la seule ambition est de préserver le surplace dans lequel il s’est confortablement installé dès sa naissance avant de s’y complaire au fil des mois…
Réveillez-vous, bon Dieu ! Sortez une fois pour toutes de vos tours d’ivoire, de l’autisme prémédité qui vous a éloignés des réalités brûlantes et d’une vox populi qui n’a pour vous que mépris et détestation. En d’autres temps, en d’autres lieux, c’est la révolte qui aurait grondé, ce sont les citoyens qui auraient pris toute l’affaire en main, seraient descendus dans la rue pour exiger le départ des incapables, pour réclamer des comptes à tous ceux qui ont conduit le pays à l’état de déliquescence actuel.
Aux armes citoyens ? Ne délirons pas ! Les armes sont déjà brandies par les « fous de Dieu », sont monopolisées par le parti d’inspiration divine et les partisans, assujettis aux uns, embrigadés par les autres, n’ont d’autre choix que d’avaler des couleuvres et de faire semblant de croire aux balivernes servies à longueur de journée.
Mais les autres, ceux qui n’ont d’allégeance ni à un parti ni à une milice, ceux dont les droits sont chaque jour bafoués, comment expliquer leur passivité, leur silence assourdissant ? Est-ce en raison des déceptions accumulées depuis un certain 14 mars 2005, est-ce à cause de l’éparpillement, des retournements, des trahisons de tous ceux qui étaient supposés mener le mouvement à bon port ?
À quoi servent les tweets et autres messages virulents étalés sur les réseaux sociaux ? À ouvrir la voie à un défoulement collectif, à exprimer une colère virtuelle qui ne peut que tomber dans l’oreille de sourds ? C’est dans la rue que les choses auraient pu être tranchées, rétablies dans le parcours normal de tout État de droit, celui du questionnement et de la reddition des comptes. Mais la citoyenneté est prise en otage, la lassitude est générale et c’est quasiment le sauve-qui-peut qui impose sa loi…
L’heure est grave et les incidents tragiques des derniers jours n’augurent rien de bon alors que l’armée se retrouve seule dans l’arène, engagée dans une véritable bataille du destin, à l’écoute désespérée d’une classe politique engluée dans ses contradictions.
Réveillez-vous, disais-je en début d’article, à l’adresse de tous ceux qui nous gouvernent ou qui ont excellé dans l’art du lavage des cerveaux. Un appel puéril dans un vaste désert ! Y a-t-il encore un responsable ou un leader politique capable d’ouvrir grand ses oreilles, de réveiller sa conscience et de faire acte de contrition ? Difficile de le croire alors que la parole est aux armes et à des chefs de clan et de parti qui n’ont d’autre ambition que d’en découdre…
Quant au leadership chrétien, inutile de revenir là-dessus : il y a longtemps qu’il a démissionné de ses responsabilités nationales et de son rôle fondateur. Un grand gâchis !