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Le réseau d’espionnage israélien ouvre de nouvelles pistes au Liban

 

 

Pendant que les politiques se disputent sur tout et rien, les services de sécurité veillent. L’annonce du démantèlement d’un réseau d’agents israéliens au Liban-Sud par la Sûreté générale n’a peut-être pas eu la place qu’elle méritait dans les médias, mais elle n’en reste pas moins une importante réalisation. D’abord parce qu’elle montre qu’en dépit de la priorité accordée aux réfugiés syriens et aux cellules jihadistes dormantes ou autres, les Israéliens continuent à être actifs au Liban sur le plan de l’espionnage et peut-être plus. Ce réseau en particulier ouvre aussi de nouvelles pistes dans la mesure où il montre que les Israéliens recrutent désormais dans les milieux syriens au Liban, tout en mettant en évidence une collusion entre certains milieux de l’opposition syrienne et les Israéliens. Jusqu’à présent, cette collusion se limitait à la région du Golan en Syrie et consistait en une aide aux combattants d’al-Nosra et d’autres groupes, mais avec ce réseau, il s’agit d’une nouvelle dimension dans la coopération. De même, un personnage-clé du réseau est fonctionnaire auprès de la Finul…
Selon les faits, la Sûreté générale a donc arrêté un Syrien de la famille Sayed qui réside à Saïda, dans le quartier dit de Jérusalem, c’est-à-dire près des domiciles de cheikh Maher Hammoud et Souhaib Hablé. Marié à une Libanaise (elle aussi a été arrêtée), Sayed a fait l’objet de plusieurs mandats d’arrêt pour vols et autres délits, mais il est en même temps lié à une partie de l’opposition syrienne installée à Istanbul, dont il toucherait un salaire. Lui et sa femme auraient donc été enrôlés pour travailler pour le compte des Israéliens par un Libanais habitant le village de Aïn Ebel et travaillant pour la Finul depuis trente ans. À partir du quartier général des Casques bleus à Naqoura, ce Libanais fait donc de fréquentes visites en Israël pour des missions de coordination coiffées par l’Onu. Selon l’enquête préliminaire, c’est à la faveur de ces visites qu’il aurait été enrôlé par un autre Libanais originaire de Aïn Ebel qui, lui, est désormais installé en Israël et occupe une fonction au ministère de la Défense. Il aurait donné à son compatriote des puces téléphoniques indépendantes du réseau libanais de télécommunications tout en lui demandant de recruter des agents au Liban dans le but de surveiller certaines personnalités et éventuellement d’effectuer des missions plus complexes.
C’est ainsi que le fonctionnaire de la Finul aurait enrôlé Sayed et lui aurait demandé, pour commencer, de surveiller les déplacements et les domiciles des cheikhs Hammoud et Hablé connus pour leurs positions en faveur du Hezbollah et de la résistance, tout comme il aurait eu pour mission de surveiller les déplacements du directeur général de la Sûreté le général Abbas Ibrahim, notamment lorsqu’il se rend à son village Kaoussariyet al-Sayyad. Sayed devait suivre ses différents itinéraires et définir la composition du convoi qui l’escorte. Selon l’enquête préliminaire, l’objectif de ces surveillances serait de préparer des attentats contre les personnalités citées dans le but à la fois de susciter une discorde confessionnelle et de porter un coup au Hezbollah et à l’État libanais. Le général Ibrahim joue en effet un rôle déterminant dans la pacification des camps palestiniens, notamment celui de Aïn el-Héloué qui regroupe des factions palestiniennes hostiles entre elles et souvent incontrôlables.
Ce camp est d’ailleurs généralement considéré comme une bombe à retardement en raison de la présence probable de cellules islamistes dans certains de ses quartiers. Des heurts entre les différentes factions palestiniennes et des assassinats de personnalités du camp se produisent régulièrement et à chaque fois les contacts parviennent à éviter une explosion généralisée et même des incidents entre le camp et la ville de Saïda, notamment dans le quartier Taamir considéré comme un foyer mixte de Palestiniens et de Libanais. Grâce à ses contacts avec les différentes organisations palestiniennes dans le camp de Aïn el-Héloué et avec les commandements en dehors du camp, le général Ibrahim est parvenu à instaurer une sorte de modus vivendi basé sur la décision des organisations palestiniennes de ne pas créer des troubles au Liban et de ne pas faire partie des divisions internes libanaises. Il y a même un engagement de la part des différentes factions de ne plus couvrir les fauteurs de troubles palestiniens au Liban.
Pour l’instant, l’enquête se poursuit, mais les autorités libanaises n’ont pas encore réussi à convaincre le commandement de la Finul de leur remettre le fonctionnaire membre de ce réseau pour qu’il soit interrogé. Celui-ci devrait pourtant avoir un rôle-clé puisque c’est lui qui se chargeait de l’enrôlement des agents et du suivi des missions qui leur étaient confiées. Il devrait aussi préciser s’il y a d’autres filières que celle du Syrien et de son épouse. Le fonctionnaire en question est actuellement arrêté et emprisonné par la Finul qui précise toutefois que la décision de le livrer aux autorités libanaises dépend du secrétaire général de l’Onu lui-même.
S’il est certain que cette affaire n’aura pas de conséquences sur les relations entre les autorités libanaises et la Finul, elle met toutefois en question la crédibilité de la force internationale au niveau du recrutement de ses fonctionnaires. Un problème de plus à ajouter à tous ceux qui se posent aujourd’hui aux autorités libanaises.