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Loi électorale : le 19 juin, nouveau délai

Philippe Abi-Akl

Le récent discours du secrétaire général du Hezbollah a servi de nouveau catalyseur au débat sur la loi électorale, en dépit des réactions mitigées qu’il a suscitées. Le leader chiite a indiqué que les puissances étrangères prêtent peu d’attention au Liban, lequel se trouve au bord du précipice.

Ce faisant, il s’est comme substitué aux diplomates qui avaient jusqu’à tout récemment pressé les parties à tenir les élections coûte que coûte, surtout qu’il existe une loi toujours en vigueur et modelable, le cas échéant. Ces appels avaient été assortis de mises en garde étrangères contre une crise institutionnelle si les délais ne sont pas honorés. Ces mises en garde ont résonné indirectement dans le discours de Hassan Nasrallah, et c’est sous cet angle que le discours est perçu favorablement par des milieux des Forces libanaises (FL).

Même si des milieux du 8 Mars retiennent surtout de ce discours sa critique du langage communautariste et du recours à la rue, c’est-à-dire du langage qu’avait fait sien le tandem chrétien, les milieux des FL préfèrent mettre l’accent sur « la souplesse » de ses propos « rassembleurs » et qui rassurent aussi bien les druzes que les chrétiens. Il s’agit pour ces mêmes milieux d’une « lueur d’espoir » à même d’éclairer la voie du consensus autour de la loi électorale. Les FL vont jusqu’à critiquer la méthode du vote qu’avaient envisagée le Courant patriotique libre et, possiblement, le courant du Futur, pour achever la réforme électorale.

Les Forces libanaises tentent de se démarquer de leurs alliés en défendant une position équidistante à l’égard du Hezbollah, d’une part, et du Courant patriotique libre, de l’autre. Aussi les milieux FL estiment-ils que M. Nasrallah a adressé un appel implicite au calme à Gebran Bassil, un souhait presque amical, le compromis étant la voie incontournable de la réforme électorale.

Sur le fond du débat, les milieux FL indiquent que le Hezbollah a fait une concession en renonçant à sa demande de la proportionnelle intégrale appliquée à la circonscription unique. C’est d’ailleurs la seule proposition que refusent les FL. Les milieux de ce parti disent n’avoir de veto sur aucun autre projet, et se disent ouverts à la proportionnelle sur base de circonscriptions restreintes. « Nous acceptons toute loi qui accorde cinquante sièges parlementaires à la composante chrétienne (comprendre aux partis chrétiens forts, NDLR). Et cela, quel que soit le mode de scrutin, mixte ou proportionnel », insistent les milieux FL, comme pour répondre à Hassan Nasrallah qui s’est dit ouvert à toute loi à même de calmer les appréhensions des druzes et des chrétiens.

Mais, au-delà des prises de position ouvertes, le débat a-t-il des chances sérieuses d’aboutir à une réforme électorale ? La séance du 15 mai, fixée à l’origine pour examiner l’approbation d’une nouvelle rallonge du mandat parlementaire, semble avoir été vidée de son objectif. Réagissant à la décision de factions chrétiennes et du courant du Futur de la boycotter si une nouvelle loi n’est pas trouvée entre-temps, le président de la Chambre a apaisé le débat en disant que cette séance ne sera que consensuelle. Résultat : sans une nouvelle loi avant le 15 mai, la séance n’aura aucun effet. « Elle n’est qu’un moyen comme un autre d’inciter les parties à une entente », selon les termes d’un ministre, qui précise que la véritable date butoir est désormais le 19 juin, date de l’expiration du mandat du Parlement. Alors que des milieux ministériels se disent optimistes quant à la possibilité d’approuver une nouvelle loi « à la dernière minute », l’autre option serait de renouveler in extremis les délais de la loi de 1960. La première option comme la seconde semblent sécurisées par la disposition du chef de l’État à signer le décret d’ouverture d’une session extraordinaire du Parlement jusqu’au 19 juin, la session ordinaire expirant le 31 mai.

Quoi qu’il en soit, ce que doit dire le président de la République à l’ouverture du Conseil des ministres aujourd’hui à Baabda devrait permettre de réorienter le débat dans un sens ou dans l’autre. Des milieux politiques informés révèlent qu’une réunion tripartite pourrait se tenir à Baabda en marge du Conseil entre le chef de l’État, le Premier ministre et le président de la Chambre. Cette réunion pourrait s’élargir ensuite pour inclure des représentants du CPL, des FL et du Parti socialiste progressiste. L’objectif en serait de fixer ne serait-ce que les principes de la nouvelle loi électorale. À en croire des sources du comité ad hoc qui avait été chargé d’élaborer une nouvelle loi, la réforme se limiterait désormais à une alternative : le mode de scrutin mixte, défendu alternativement par le CPL, les FL, le PSP et le courant du Futur, et la proportionnelle appliquée à treize circonscriptions. La seconde formule s’inspire du projet Mikati et serait propice à une réduction éventuelle de la taille des circonscriptions pour faciliter le consensus. Si la volonté y est, le débat devra au moins être tranché incessamment entre l’une et l’autre de ces deux formules.