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Possibles tensions autour de l’ouverture de la session extraordinaire

Sandra NOUJEIM

Aucune avancée visible n’est venue compléter en fin de semaine le consensus obtenu vendredi dernier sur la proportionnelle appliquée à quinze circonscriptions. Certains détails, et pas des moindres, seraient en effet toujours discutés. La question de la délimitation des quinze circonscriptions ne serait pas complètement réglée, en dépit de l’entente « de principe » sur leur nombre.

Certains points proposés par le député Forces libanaises (FL) Georges Adwan, chargé actuellement de faire la navette entre les parties, seraient toujours problématiques. Il en va par exemple du découpage du Mont-Liban en quatre circonscriptions (Chouf-Aley, Baabda, Metn-Nord et Kesrouan-Jbeil), où l’autonomie du caza de Baabda fait toujours objet de divergences. Un autre point non résolu proposé par M. Adwan serait le découpage de Beyrouth en deux circonscriptions : Achrafieh (avec une possible inclusion de Medawar) d’une part, et Mazraa-Ras-Beyrouth-Bachoura, d’autre part. En somme, « les chrétiens d’une part, et tous les autres, de l’autre », constate un observateur d’un ton critique. Le troisième point débattu serait lié à Zghorta : alors que M. Adwan propose, selon le quotidien al-Hayat, la division du Nord en trois circonscriptions (Akkar, Tripoli-Minié-Denniyé, Zghorta-Bécharré-Koura-Batroun), d’autres parties souhaiteraient lier Zghorta à Minié-Denniyé, apprend-on de source informée des échanges d’hier.

Outre la question du découpage, deux autres éléments poseraient toujours problème. D’abord, le vote préférentiel que le Courant patriotique libre (CPL) souhaite restreindre à chaque communauté, prise séparément. Ce vote préférentiel « à caractère communautaire » est également prôné par les FL, mais de manière plus tacite, sous forme de vote préférentiel appliqué au caza.

L’autre élément de discorde porterait sur le transfert des sièges attribués à des chrétiens vers les circonscriptions où ils sont majoritaires. De sources concordantes, trois transferts de sièges « maronites » seraient envisagés : de Tripoli vers Batroun, de la Békaa-Ouest vers Jbeil et de Baalbeck-Hermel vers Bécharré.

Les parties hostiles à la communautarisation des votes, à commencer par le président de la Chambre, Nabih Berry, ne seraient toujours pas près d’accepter le transfert de sièges ni le vote préférentiel « communautaire », assure à L’OLJ un député centriste. C’est dans ce sens que s’est prononcé hier le député Sleiman Frangié, lors d’une rencontre à Bnechii. « Le grand danger est dans la tentative de mater les chrétiens. Le danger plus grand est celui du transfert des sièges », a-t-il déclaré.

Le tandem chrétien s’attendrait, lui, à monnayer son adhésion à la proportionnelle, sous forme de « garanties », rapporte une source informée auprès des FL.
Le chef du CPL, Gebran Bassil, est revenu à la charge hier soir, assimilant à la proportionnelle aussi bien la proposition dite orthodoxe, la préqualification, le scrutin mixte et le one man one vote, lors d’un iftar dans la Békaa-Nord.

Le 5 juin

Revendiquant une nouvelle fois ces garanties, le député Ibrahim Kanaan a déclaré hier à la LBCI que « le vote préférentiel appliqué au caza a déjà fait du chemin et ne se heurte à aucune opposition ». Il a déclaré surtout que « certains points n’ont pas encore été négociés en profondeur, dont le transfert des sièges ». Il n’est pas sûr jusqu’où le camp aouniste irait pour obtenir les « garde-fous » qu’il souhaite incorporer à la proportionnelle.

Des tensions s’annonçaient hier autour de l’ouverture d’une session extraordinaire. Pour rappel, la session ordinaire prend fin le 31 mai et le mandat de la Chambre arrive à terme le 19 juin prochain. Légiférer entre ces deux dates nécessiterait l’ouverture d’une session extraordinaire, laquelle se fait par décret signé par le chef de l’État et le Premier ministre. Depuis mercredi dernier, un consensus avait déjà pris forme pour l’ouverture d’une session extraordinaire, l’option du vide étant crainte par toutes les parties. Le Premier ministre Saad Hariri a signé avant-hier le décret en question, avant de l’expédier au palais présidentiel. Selon nos informations, cette démarche aurait été suivie dans l’immédiat d’un appel téléphonique du président de la Chambre au chef de l’État, pour confirmer l’entente sur l’ouverture d’une session extraordinaire. C’est à la suite de cet appel que le président de la Chambre a décidé hier de reporter au 5 juin prochain la séance législative initialement fixée pour aujourd’hui. Il n’est pas sûr que cette démarche, qui anticipe la signature présidentielle du décret en question, laisse indifférent le président Michel Aoun. De source informée, celui-ci pourrait repousser à l’extrême la signature du décret, d’abord pour faire acte d’autorité, mais aussi pour exercer des pressions autour de la réforme électorale.

Le tandem chrétien continue, du reste, de proposer l’ultime recours du « vote » de la nouvelle loi électorale, à défaut d’un consensus. C’est dans ce sens que s’est prononcé hier soir Gebran Bassil, estimant que le gouvernement est responsable d’élaborer un projet de loi et de le transmettre au Parlement : en cas d’absence de consensus, c’est l’option du vote en Conseil des ministres qui doit prévaloir, selon lui.
Mais, pour un député centriste, rien ne serait envisageable en dehors du consensus. Les scénarios à prévoir avant le 19 juin seraient, selon lui, les suivants : une nouvelle loi qui justifierait une prorogation d’un an du mandat du Parlement ou le maintien de la loi de 1960, avec un report technique des législatives à septembre prochain.