Si une polémique existentielle douloureuse divise le pays sur la responsabilité, in fine, du drame des militaires otages exécutés, de profondes divisions, purement politiques celles-ci, opposent les responsables sur le cours à prendre, après les deux opérations militaires conduites l’une par le Hezbollah, l’autre par l’armée, pour rétablir la souveraineté libanaise sur une partie de sa frontière orientale passée en 2014 sous domination jihadiste. La fracture politique, à ce sujet, semble totale.
Jouant la carte de l’union sacrée, le Premier ministre, s’exprimant hier en Conseil des ministres, a affirmé que la solennité du moment et l’intérêt supérieur du Liban commandent que l’occasion soit mise à profit pour « renforcer l’unité nationale » et non « approfondir les divisions politiques ». « La journée de deuil national que nous observons demain (aujourd’hui), doit être une occasion d’unité nationale et non de division politique », a affirmé M. Hariri, après avoir appelé les ministres à observer une minute de silence en hommage aux soldats ayant donné leur vie. Je demande à chacun de se hisser au niveau de nos héros martyrs et de rester à l’écart des petites querelles politiques parce que le responsable de ce crime est l’organisation terroriste Daech.
Dans son hommage aux soldats martyrs, M. Hariri a tenu à citer en particulier le colonel Noureddine Jamal, qui a refusé de se rendre lors de l’offensive jihadiste du 2 août 2014 sur la caserne de Ersal, et qui est tombé sous les balles des agresseurs.
Défendant la cause de l’unité nationale et de l’intérêt supérieur du Liban, Hariri a déclaré que le Liban ne fait partie d’aucun axe, mais qu’il participe activement à la coalition internationale pour la lutte contre le terrorisme. Et d’ajouter : « Nous avons réussi à Paris à lancer trois conférences au profit du Liban (…). Ce sont là des réalisations qui profitent à tout le Liban et à tous les Libanais, et ne peuvent être complétées sans le soutien des frères arabes. » « Au départ, nous avons suivi une politique de distanciation afin que le Liban reste neutre par rapport aux conflits dans la région. En ce moment, il est dans l’intérêt du Liban de ne pas gâcher les relations avec tous ses amis, en particulier avec ses frères, et de chercher à protéger les intérêts du Liban et des Libanais », a-t-il conclu.
Pour sa part, le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Marwan Hamadé, a soulevé en Conseil des ministres la question du Tweet posté lundi par le ministre d’État saoudien pour les Affaires du Golfe, Thamer al-Sabhane, qui a invité les Libanais à choisir entre soutenir le Hezbollah ou s’opposer à lui. M. Hamadé, soutenu par le ministre d’État à la Planification, Michel Pharaon, a insisté sur l’importance de s’attacher à la politique de distanciation du Liban. Même son de cloche chez Pierre Bou Assi (FL), ministre des Affaires sociales.
Victoire de l’axe de la résistance
Adoptant une attitude diamétralement opposée et fort des « victoires » enregistrées sur le terrain aussi bien au Liban qu’en Syrie, le Hezbollah a appelé hier, à l’issue de la réunion hebdomadaire de son bloc parlementaire, à une « correction » des relations libano-syriennes. « Il est grand temps de corriger nos relations avec la Syrie et de combler les failles qui vont contre les intérêts des deux pays », précise ce texte.
Revenant sur la bataille menée contre le groupe État islamique, le communiqué du Hezbollah a affirmé : « La bataille des jurds a prouvé que la seule stratégie de défense viable au Liban repose sur le triptyque peuple-armée-résistance. » « La victoire ayant conduit à la “deuxième libération” (la première étant celle qui a conduit au retrait de l’armée israélienne du Liban-Sud, en 2000) est celle de l’axe de la résistance », insiste le texte.
Revenant sur le sujet, après l’Arabie saoudite, la Grande-Bretagne a jugé hier « regrettable » le marché ayant permis aux combattants jihadistes d’être évacués en Syrie.
Notons que le président Michel Aoun a convoqué hier le conseil supérieur de la défense à se réunir à 11h30 au palais de Baabda, immédiatement après la cérémonie prévue au ministère de la Défense.