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Le Parlement adapte, enfin, la législation libanaise sur le blanchiment d’argent

Le Parlement adapte, enfin, la législation libanaise sur le blanchiment d’argent

 

Outre la mise en conformité du Liban avec les normes internationales de lutte contre les fonds illicites, la séance législative d’hier a permis l’adoption d’une dizaine de textes dits de « nécessité ».

Après avoir voté la veille une vingtaine de lois dites de « nécessité » pour l’économie du pays – notamment pour lui éviter de perdre des centaines de millions de dollars en prêts internationaux ou permettre à l’État de continuer à dépenser ou emprunter sans budget – les députés ont repris hier leur séance marathon pour examiner d’autres textes attendant de l’être depuis plusieurs années.

Mise en conformité internationale

Les députés ont d’abord adopté un ensemble de textes destinés à mettre en conformité la législation libanaise avec les normes internationales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, le terrorisme et l’évasion fiscale. Depuis plusieurs années, le ministère des Finances et le secteur bancaire n’ont cessé de mettre en garde sur le fait que la non-adoption de ces textes risquait d’entraîner la réinscription du Liban dans la liste des pays non coopératifs en matière de lutte contre le blanchiment d’argent du Groupe d’action financière (Gafi) ou du Forum mondial de l’OCDE. Le Liban avait été retiré de la liste noire du Gafi en 2002, à la suite de l’adoption de la loi sur le blanchiment l’année précédente.

Trois projets de loi déposés au Parlement en 2012 ont ainsi été entérinés. Le premier introduit l’obligation de déclarer aux douanes toute somme supérieure ou égale à 15 000 dollars (ou son équivalent dans d’autres devises) transporté en numéraire (espèces, chèques, titres, etc.) lors du passage des frontières libanaises. Le deuxième permet à un pays tiers de demander à la Commission spéciale d’investigation (CSI) de lever le secret bancaire concernant une personne physique ou morale, au cas où elle ferait l’objet de soupçons sérieux d’évasion fiscale. Le troisième texte amende la loi de 2001 en définissant le blanchiment comme un crime en soi – que les professions soumises au secret professionnel (notaires, avocats, banquiers, etc.) sont désormais tenues de signaler à la CSI – et élargit son champ pour y inclure, entre autres, le financement des organisations terroristes, la corruption et le trafic d’influence, ou encore les infractions relatives à la propriété intellectuelle. En sus, les députés ont adopté un projet de loi amendant la loi sur le commerce terrestre pour la rendre compatible avec certaines dispositions des lois précitées ; tandis qu’un autre amendant dans le même but le code de procédure fiscale a été renvoyé en commission. « Mais il s’agit de points mineurs qui n’entraveront pas l’application des autres lois en la matière », indique à L’Orient-Le Jour le député Simon Abi Ramia (bloc du Changement et de la Réforme). Enfin, le Parlement a ratifié la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999 – non inscrite à l’ordre du jour initial.

Financement des municipalités

Après avoir ratifié la veille en urgence une dizaine de conventions de prêts de partenaires internationaux – portant sur un montant global supérieur à 700 000 dollars – afin qu’ils ne soient pas annulés, les députés ont également voté un autre wagon de textes similaires. Il s’agit en l’espèce : d’un prêt du Fonds arabe pour le développement économique et social (Fades) pour réparer les infrastructures détruites pendant le conflit de 2006 (217 millions de dollars), de deux prêts du Fades (91 millions) et du Fonds koweïtien pour le développement économique arabe (FKDEA ; 70 millions) pour financer le détournement d’une partie du cours d’eau du Litani ; de deux autres prêts du FKDEA finançant respectivement la réhabilitation des centrales électriques de Zouk et Jiyeh (85 millions) et la construction d’un abattoir à Tripoli (19 millions) ; d’un prêt de la Banque mondiale pour réduire la pollution industrielle (15 millions) ; et enfin d’un prêt chinois de coopération technique et économique (8 millions).

Les discussions ont en revanche achoppé sur une proposition de loi amendant la loi sur la TVA afin de définir les modalités de transfert des recettes de la surtaxe de 10 % sur les revenus de la téléphonie mobile aux municipalités. Depuis 1994, ces recettes n’ont jamais été reversées aux municipalités, alors que la loi l’exige, mais transférées par le ministère des Télécoms au Trésor – sauf entre 2010 et 2014 –, notamment au prétexte que la loi ne permettait pas de déterminer leurs modalités de répartition. « Le texte proposait de contourner cet obstacle en répartissant ces revenus selon deux critères – le nombre d’habitants recensés et le nombre d’abonnés à la téléphonie fixe – et des prorata différents pour les villages, les municipalités et les fédérations de municipalités », résume Simon Abi Ramia. Après un vif débat dans lequel les députés du Courant du Futur ont menacé de quitter la séance en cas d’adoption, « le texte a été rejeté et il a été décidé que le gouvernement préparerait un projet de décret reprenant l’essentiel de ses dispositions », ajoute M. Abi Ramia. De manière inattendue, les députés ont également voté une proposition rédigée pendant la séance et prolongeant de deux ans le délai d’expiration (initialement fixé à avril 2016) de la loi d’avril 2014 qui autorise le gouvernement à délivrer temporairement des permis de production électrique au secteur privé.