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Une convergence saoudo-iranienne en faveur du Liban est-elle possible ?

 

La situation

Fady NOUN |

L’analogie avec la guerre est frappante. De 1975 à 1990, les Libanais ont vécu tous les jours la guerre civile comme si elle était sur le point de finir. Quinze ans sont passés avant que le canon cesse de tonner. La crise de la vacance présidentielle va-t-elle suivre le même schéma ?

La 41e séance parlementaire consacrée à l’élection d’un nouveau président de la République libanaise n’a pu se tenir, hier, le quorum des deux tiers (86 députés sur 128) n’ayant pas été atteint, et une 42e séance a été fixée au 13 juillet 2016.
La présidence est vacante depuis le 25 mai 2014, date de la fin du mandat de Michel Sleiman, rappelle-t-on.

Un nouvel horizon a été fixé mercredi par Nabih Berry aux espoirs de sortie de crise. Début août, la conférence nationale de dialogue doit se réunir pour tenter d’en parler, sachant que même les Forces libanaises prônent désormais un règlement qui prévoirait l’élaboration d’une nouvelle loi électorale, l’élection d’une nouvelle Chambre et, partant, d’un nouveau chef de l’État qui serait Michel Aoun.

Mais on n’en est pas là encore, quoique certains continuent de placer leurs espoirs dans un rapprochement entre le courant du Futur et le Courant patriotique libre pour débloquer la présidentielle. C’était hier au tour de Georges Adwan, vice-président des FL, d’en évoquer la possibilité, sans que quoi que ce soit de concret ne soit encore proposé.

Le grand capital moral d’une sortie de crise dans cette direction reste la rencontre du patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, avec le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans l’église Saint-Joseph de Haret Hreik, le mois dernier.

Certes, cette réunion est restée secrète, pour éviter au chef de l’Église maronite des surenchères légitimistes du type : le patriarche est visité et ne visite pas. Mais si le patriarche a pu convaincre son interlocuteur de l’importance, à ses yeux de chef religieux et de garant du vivre-ensemble, de l’élection présidentielle, le second n’a pas manqué d’affirmer que la clé d’un règlement réside justement dans un rapprochement entre Michel Aoun et Saad Hariri.

Comment ce rapprochement peut-il se réaliser ? Certains, et nos chroniqueurs politiques y font souvent allusion, escomptent un déblocage venu d’Iran, via la France.
Pour l’Iran et le Hezbollah, par contre, ce déblocage doit nécessairement venir de l’Arabie saoudite.

Selon ces sources, tout comme le président François Hollande a parlé du dossier libanais avec le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, il devrait évoquer également ce dossier avec le vice-prince héritier d’Arabie saoudite Mohammad ben Salmane, qui est attendu à Paris les 27 et 28 juin pour une visite officielle axée sur les liens bilatéraux et les dossiers régionaux.

On peut être sûr que le ministre français des AE, attendu en juillet à Beyrouth, aura exploré ces sorties de crise possibles avec les deux grands rivaux régionaux dont les responsables auront visité Paris. C’est d’autant plus souhaitable, ajoutent certaines sources, que pour Saad Hariri, et compte tenu de ses rapports distants avec le prince héritier Mohammad ben Nayef, le seul espoir qu’il lui reste de pouvoir débloquer ses affaires en Arabie saoudite réside dans les bons rapports qu’il pourrait entretenir avec Mohammad ben Salmane.

Le Conseil des ministres
Retour sur terre avec la réunion spéciale que le Conseil des ministres consacre aujourd’hui aux projets gérés par le CDR. Ce sera, une fois de plus, une plongée dans l’univers de l’opacité et de la dilapidation des biens publics. Un spectacle qui se répète et que les responsables ne sont pas souvent en mesure de juguler, en raison de leur vulnérabilité propre en la matière.

Le Conseil des ministres va se pencher en particulier aujourd’hui sur le dossier de la gestion des déchets, à partir d’une anomalie relevée par le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk. Ce dernier a en effet émis des doutes, en public, sur la régularité des appels d’offres relatifs aux deux décharges de Bourj Hammoud et Costa Brava.

Ces choses-là ne sont pas visibles pour un profane, mais pour un connaisseur, elles sautent aux yeux. En comparant les prix agréés pour le traitement des ordures sur les deux sites, on observe en effet que l’opération d’enfouissement des déchets coûte 10 dollars de plus, par tonne, à Costa Brava qu’à Bourj Hammoud. Pourquoi ? s’est interrogé M. Machnouk. En effet, pourquoi ? ne peut-on que répéter après lui.

Selon certaines informations, le débat aujourd’hui pourrait remettre en cause la totalité des appels d’offres, et ramener l’affaire à son point de départ, ce qui pourrait retarder considérablement la solution et conduire à une saturation des aires de stockage près des deux décharges, qui n’ont pas une capacité infinie. Un nouveau retard serait donc très préjudiciable et « sentirait mauvais », comme la plupart des marchés qui se concluent ces derniers temps. Comme ce procès intenté à Sukleen et que les avocats s’ingénient à retarder et à rendre aussi opaque que possible, il y a de quoi désespérer une fois pour toutes de l’honnêteté.