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Une guerre des plans entre la commission ad hoc et la société civile

Cela fait exactement dix jours, aujourd’hui, que la commission ministérielle en charge du règlement de la crise des déchets a annoncé son plan de règlement de la crise des déchets, sans réussir à convaincre les activistes de la société civile – lesquels suivent de près ce dossier en parallèle – du bien-fondé des idées avancées pour en finir avec ce problème en deux temps : à court terme, afin de parer au plus urgent, c’est-à dire ramasser les ordures des rues, des bords de fleuves et des vallées pour commencer à les traiter, et, à long terme, en mettant en place un mécanisme complet pour la gestion de ce dossier.

Aujourd’hui et demain, le ministre de l’Agriculture, Akram Chehayeb, qui préside la commission ministérielle ad hoc, doit reprendre ses réunions avec les responsables politiques ainsi qu’avec les activistes parmi ses détracteurs pour répondre à leurs appréhensions et observations, dans l’espoir de parvenir à mettre fin au mouvement de contestation qui a ressurgi à l’échelle nationale avec l’annonce du plan. Celui-ci prévoit, rappelle-t-on, la réouverture pour sept jours seulement de la décharge de Naamé, ainsi que l’aménagement d’autres, notamment à Srar, dans le Akkar et Masnaa, dans la Békaa. Hier, des manifestations ont été organisées à Majdel Anjar pour protester contre l’aménagement d’une décharge à Masnaa.

Mais le temps presse. La météo prévoit les premières pluies à partir de mercredi. Des averses risquent d’accentuer la pollution et de rendre plus difficile le processus de ramassage des ordures. Paradoxalement, les détracteurs du plan appellent le ministre à décréter l’état d’urgence écologique.

Au rythme de mouvements de contestation qui se sont poursuivis au cours du week-end, quoique motivés par d’autres griefs que ceux de la gestion du dossier des déchets, la commission Chehayeb et les activistes de plusieurs collectifs ont procédé à un échange très particulier à coups de communiqués, critiquant chacun dans le menu détail les observations de l’autre sur la gestion du problème. Les deux parties ont essayé de ne pas paraître trop négatives, s’efforçant chacune de relever des points positifs dans l’attitude de l’autre. Sauf que les points positifs se rapportent à des généralités, comme l’annulation des résultats des appels d’offres de la gestion et du traitement des détritus, le fait d’imposer le tri à la source ou encore la suppression de la dette des municipalités et la décision de confier à celles-ci la gestion des déchets.

Des doutes sur la période transitoire
Samedi, le mouvement dit du « 29 août » a tenu une conférence de presse devant le ministère de l’Environnement pour annoncer son rejet du plan Chehayeb « qui n’est qu’un leurre et un masque servant à camoufler une volonté de louvoyer, sans offrir des solutions satisfaisantes, et sans mettre fin à la corruption et à la dilapidation des fonds publics ». Il a surtout contesté la période transitoire fixée à 18 mois par la commission pour traiter dans l’urgence les déchets accumulés au cours des deux derniers mois, partant du principe que « le plan Chehayeb ne définit pas les mesures précises qui seront appliquées durant cette période ». Le mouvement a dénoncé « des décisions qui ne tiennent pas compte des impératifs écologiques de rigueur », fustigeant en particulier le recours aux décharges, notamment à Masnaa, « où la nature poreuse de la roche favorisera une pollution des nappes phréatiques », et reprochant à la commission d’avoir « décidé d’installer les décharges dans les régions les plus pauvres au mépris du principe de la décentralisation administrative ». Il a aussi trouvé que le plan Chehayeb ouvre la voie au monopole et appelé le gouvernement à abroger la décision par laquelle il l’avait entériné.
Le mouvement a proposé des solutions alternatives dont notamment décréter l’état d’urgence écologique pour transférer les déchets vers des sites où ils peuvent être triés avant la saison de pluie, sans préciser toutefois où ces sites doivent se trouver, faire fonctionner sans tarder les usines de traitement des détritus, réaménager les carrières pour y entreposer les matières inertes, réduire la production de déchets et imposer le tri à la source. )
La commission Chehayeb a répondu hier au mouvement dans un communiqué qui explique exhaustivement chaque démarche qu’elle envisage d’appliquer et sa finalité, en se disant ouverte à toute suggestion pouvant l’aider à améliorer son plan. Elle a ainsi demandé au collectif de lui fixer un lieu vers lequel les déchets pourraient être transférés en vue d’un tri pour qu’il soit utilisé comme projet pilote.
La commission a expliqué que des décrets d’application doivent être adoptés par les ministères en vue d’une exécution de l’ensemble des étapes de son plan. Un des avantages de ces décrets est qu’ils prouveront que la période transitoire ne se prolongera pas, selon le texte qui souligne le souci de la commission de combatte la corruption dans ce secteur en rappelant que l’ONG La Fassad (Non à la corruption) fait partie de la commission au sein de laquelle elle est représentée par M. Yehia Hakim.

La commission a en outre assuré qu’aucune décharge ne sera aménagée sans l’accord des municipalités et des associations des régions concernées, en expliquant que les études « scientifiques » relatives au réaménagement des sites extrêmement pollués, notamment à Srar et à Bourj Hammoud, ont commencé à être élaborées.
Après avoir indiqué que « les déchets qui seront collectés seront d’abord triés sur les sites de La Quarantaine et de Amroussiyé avant leur transfert sur d’autres lieux », la commission s’est engagée à fournir des explications supplémentaires sur « les mesures écologiques et de génie qui seront prises pour assurer l’étanchéité et la salubrité des sites prévus pour accueillir des décharges ».

Concernant la décharge de Naamé, elle a assuré qu’elle ne sera ouverte pour sept jours qu’après l’ouverture des décharges de Srar et de Masnaa, et qu’ « il ne pouvait y être autrement avec la saison des pluies qui approche et qui commande le transfert d’une partie des déchets pour y être traitée sous la supervision d’une commission d’élus locaux qui s’assurera de sa fermeture ».

En soirée, l’ONG Sakker el-Dekkené ainsi que des groupes ayant vu le jour après la crise des déchets ont fait paraître un communiqué critiquant également plusieurs aspects du plan Chehayeb.