Pas de Conseil des ministres cette semaine. La réunion qui était prévue pour jeudi n’aura pas lieu de toute évidence. Le chef du gouvernement, Tammam Salam, n’a même pas pris la peine de la convoquer. C’est qu’avec la page des promotions militaires et des nominations sécuritaires qui a été tournée – à moins d’un rebondissement de dernière heure qui a cependant très peu de chances de se produire d’ici à demain – c’est le dossier des déchets qui a en même temps été gelé, pour l’instant.
Retour donc à la case départ. Le chef du bloc parlementaire du Changement et de la Réforme, le général Michel Aoun, a très mal pris, comme on pouvait s’y attendre, l’échec des tractations qui devaient permettre d’élever au rang de général de division son gendre, le général Chamel Roukoz, ainsi qu’un groupe d’autres officiers et retarder de la sorte leur départ à la retraite. Pendant que le ministre de la Défense, Samir Mokbel, assurait sur un ton sans appel samedi, au terme d’un entretien avec l’ancien président Michel Sleiman, à Amchit, que « le dossier des promotions militaires est clos » et que « celles-ci dépendent du seul ministre de la Défense », le général Aoun multipliait les menaces, tantôt de retirer ses ministres du gouvernement et tantôt de recourir à l’escalade.
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Cette escalade devait en principe commencer à se manifester hier, à la faveur de son discours pour le 25e anniversaire du 13 octobre 1990, qui marque son éviction du pouvoir et l’entrée des troupes syriennes au Liban. Le ton du général Aoun devait cependant surprendre. En dépit des nombreux messages politiques qu’il comportait, son discours n’était pas agressif ou provocateur. Le Hezbollah, indique une source digne de foi, aurait exercé des pressions sur son allié chrétien pour le convaincre de ne pas recourir à l’escalade, en lui promettant en échange de le soutenir dans son bras-de-fer avec le gouvernement, ce qui se traduirait, notamment, par le gel du dossier des déchets.
Il serait utile de rappeler dans ce contexte qu’avant l’émergence du dossier des promotions militaires, le bloc aouniste était engagé dans une bataille autour du mécanisme de prise de décision en Conseil des ministres. Celle-ci a également servi de prétexte pour bloquer les réunions du gouvernement dont les chances d’être relancées, note-t-on dans divers cercles politiques, ne font que diminuer. Si Tammam Salam n’a toujours pas convoqué le Conseil des ministres à une réunion qui s’avère pourtant nécessaire pour la signature de deux décrets devant permettre à la décharge de Srar d’être fonctionnelle, c’est parce qu’il n’a toujours pas obtenu la garantie que le Hezbollah serait présent. Les Marada et le bloc Berry ont, en revanche, fait savoir au Premier ministre qu’ils sont prêts à y prendre part.
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Tammam Salam n’a pourtant pas encore baissé les bras. Les contacts et les tractations politiques doivent reprendre en ce début de semaine. Il est cependant presque certain que la fête de l’Hégire, qui sera célébrée mercredi, s’étendra sur toute la semaine, non seulement à cause du blocage, mais parce que le président de la Chambre, Nabih Berry, qui joue normalement le rôle de médiateur, ne sera de retour au Liban que dimanche prochain, après une visite de trois jours en Roumanie, suivie d’un séjour de quelques jours à Genève.
En d’autres termes, le dossier des déchets est encore une fois gelé. L’étude de terrain, préliminaire à l’aménagement d’une deuxième décharge à Ham, dans la partie nord de la Békaa, au niveau de la frontière avec la Syrie, a été suspendue, et des voix commencent aussi à se faire entendre dans cette région, majoritairement chiite, contre les travaux qui doivent permettre à Ham d’accueillir une partie des déchets de Beyrouth et du Mont-Liban. Dans le même temps, à Srar, dans le Akkar, où l’agrandissement de la décharge est presque achevé, le même mécontentement commence à se manifester un peu bruyamment.
Cette fronde ne serait pas spontanée, relève-t-on dans certains milieux politiques. Elle serait une réponse indirecte à l’échec des négociations autour des promotions militaires mais elle ne devrait pas normalement prendre une dimension plus importante, aucune partie n’étant en mesure d’assumer la responsabilité d’un blocage d’une solution au problème des déchets.