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Blocage de la présidentielle et craintes d’une résurgence des tiraillements politiques

 

Philippe Abi-Akl 

La tournée entamée par le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, auprès des différents responsables politiques n’a rien à voir avec la présidentielle, mais se rapporte aux municipales, prévues en principe pour mai. Le ministre a pris bien soin de le préciser lundi, avant d’aller hier à la rencontre du chef des Forces libanaises, Samir Geagea, avec qui il a quand même abordé le dossier de la présidentielle, mais pour lui faire part de ses objections à son éventuel appui à la candidature de Michel Aoun, chef du bloc parlementaire du Changement et de la Réforme, à la tête de l’État.
Le courant du Futur, auquel Nouhad Machnouk appartient, continue quant à lui de soutenir la candidature du chef des Marada, Sleiman Frangié, à la tête de l’État. Pour les deux camps, il s’agit cependant de vœux pieux, car le dossier de la présidentielle est bel et bien bloqué. La dynamique lancée par l’initiative de Saad Hariri s’est tassée avec l’exacerbation du conflit irano-saoudien qui n’est pas près d’être réglé, de l’avis de plusieurs observateurs.
En dépit des nombreuses tentatives menées par des parties internationales pour contenir la tension qui prévaut au niveau des rapports entre Riyad et Téhéran depuis l’exécution par l’Arabie saoudite de l’uléma chiite opposant Nimr el-Nimr, le conflit irano-saoudien semble être parti pour durer, mais de sources diplomatiques arabes, on estime qu’il restera limité au niveau politique. Une guerre entre les deux demeure interdite, tout comme la fermeture des détroits de Bab el-Mandeb, entre la mer Rouge et le golfe d’Aden, et d’Ormuz, qui relie le golfe Persique au golfe d’Oman. Les deux États continueront de se livrer la guerre par pays arabes interposés, dont le Liban. Les déclarations incendiaires et les attaques verbales réciproques des responsables du Hezbollah et du courant du Futur ne sont que l’expression de la tension saoudo-iranienne, qui restera à son tour limitée au domaine médiatique. De mêmes sources, on se veut rassurant en écartant la possibilité de heurts sunnito-chiites au Liban.
Selon les visiteurs de Riyad, l’Arabie saoudite refuse obstinément de discuter avec l’Iran des dossiers des pays comme l’Irak, la Syrie, le Yémen, Bahreïn et même le Liban, partant du principe que Téhéran n’a pas à se mêler de leurs affaires et à se comporter comme s’il était responsable des chiites de ces États, contribuant ainsi à conférer un caractère confessionnel aux conflits qui émergent dans la région.
Le revirement du Hezbollah qui a durci sa position par rapport à la présidentielle, barrant la voie à toute possibilité de compromis, et laissant entendre qu’un retour de Saad Hariri à Beyrouth doit répondre aux conditions que posent le 8 Mars et non pas le 14 Mars, doit être interprété comme une réponse de l’Iran à la position saoudienne. Pratiquement, cela signifie que l’élection d’un président de la République au Liban n’est pas pour bientôt et qu’une reprise des tiraillements entre les deux camps adversaires locaux au sujet de dossiers conflictuels est à craindre. La question de savoir si le Conseil des ministres convoqué pour demain se tiendra se pose donc dès à présent. Déjà, le Courant patriotique libre laisse planer le doute sur la question.