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De la nécessité, aujourd’hui plus que jamais, de délimiter les frontières avec la Syrie

 

Philippe Abi-Akl | 

Depuis le début du mandat de l’ancien chef d’État Michel Sleiman, le Liban réclame à cor et à cri la délimitation des frontières avec la Syrie. Une nécessité que commandent de plus en plus aujourd’hui les conditions sécuritaires, les frontières entre les deux pays étant perméables à l’infiltration des armes et des milices de toutes sortes dans les deux sens, dont les jihadistes localisés dans le jurd de Ersal.
Dans son onzième rapport sur l’application de la résolution 1701 (2006) du Conseil de sécurité, remis le 10 mai aux membres du Conseil de sécurité, le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, a relevé qu’« aucun progrès tangible » n’a été enregistré sur la délimitation des frontières communes entre la Syrie et le Liban.

À la veille de la visite de Ban Ki-moon à Beyrouth, M. Sleiman avait envoyé au secrétaire général une lettre dans laquelle il évoquait quatre points fondamentaux à ce propos, à savoir la délimitation des frontières, l’extension du mandat des forces de la Finul, le retour des réfugiés syriens chez eux et la réactivation du groupe international de soutien au Liban en vue de l’obtention, par le Liban, d’une compensation pour les pertes subies du fait de l’afflux des Syriens sur son territoire.

L’historique de la position de refus affichée par la Syrie au sujet de la délimitation des frontières et les moult tergiversations auxquelles Damas a recouru sont édifiants.
Dès le début de son mandat, raconte un ancien ministre, Michel Sleiman avait évoqué ce sujet avec le président Bachar el-Assad, notamment lors de sa première rencontre avec lui, qui avait eu lieu à Paris à l’occasion des célébrations du 14 juillet 2007. Le président français de l’époque, Nicolas Sarkozy, avait invité son homologue syrien pour le remercier d’avoir facilité l’élection présidentielle au Liban.

En mai 2008 s’est tenu le premier sommet entre les deux présidents syrien et libanais, à Damas, une rencontre au cours de laquelle M. Sleiman a soumis à son interlocuteur un dossier fourni sur les relations libano-syriennes laissées en suspens, dont la question des disparus libanais et celle de la délimitation des frontières. Ce sujet avait suscité d’emblée des réserves de la part de la partie syrienne. Dès que M. Sleiman a évoqué le dossier des disparus libanais, la réponse du ministre des Affaires étrangères syrien Walid Moallem a fusé : « Nous avons également des disparus au Liban. » Et Bachar el-Assad de trancher : « Nous n’avons pas de Libanais dans nos geôles. »

Lorsque M. Sleiman a parlé de la nécessité de délimiter les frontières et de redynamiser les comités mixtes mis en veilleuse depuis plusieurs années, il a insisté sur le besoin de clore ce dossier de manière à servir les intérêts des deux pays et empêcher les infiltrations et les contrebandes de toutes sortes. M. Assad a alors considéré qu’il est impossible de procéder à la délimitation des frontières à l’ombre de l’occupation israélienne des fermes de Chebaa et des collines de Kfarchouba. Ce à quoi M. Sleiman a proposé de commencer par la délimitation des frontières du côté nord, une requête qui lui a valu la même réaction de refus.

Selon un responsable de sécurité, l’armée a procédé depuis un certain temps, avec l’aide de la Grande-Bretagne, à l’installation de miradors de surveillance tout le long de la frontière qui s’étend du Qaa jusqu’à l’Anti-Liban, ce qui devrait lui permettre de mieux contrôler ces frontières, surtout depuis que les organisations terroristes se sont positionnées dans le jurd de Ersal et tentent de percer les positions de la troupe.
Depuis, une requête formulée par certaines parties libanaises a consisté à demander l’extension du mandat de la Finul qui devrait inclure la protection des frontières du côté est également, et non seulement le long de la frontière sud du pays. Une initiative qui, commente un diplomate, suscite des réserves sérieuses, la crainte étant de voir les forces multinationales devenir la cible des terroristes et faire l’objet de rapts multiples avec les conséquences néfastes que de tels développements pourraient entraîner au sein de la force onusienne.

Certaines figures politiques libanaises continuent par ailleurs de réclamer à ce jour auprès de l’Onu que les deux questions de la délimitation des frontières et du retour des réfugiés syriens soient placées à l’ordre du jour des négociations qui ont actuellement lieu sous la houlette de l’envoyé spécial dans la région Staffan de Mistura. Elles se fondent notamment sur les propos du secrétaire général, Ban Ki-moon, lorsqu’il avait affirmé, lors de son escale beyrouthine, « la nécessité de délimiter les frontières libanaises au sud, à l’est, ainsi que les frontières maritimes, qui ne sont pas définitives à ce jour et ne figurent pas dans les registres de l’Onu ».