Raids, arrestations, détention administrative… Dix jours après l’attaque terroriste à Douma, qui a causé la mort de Ali, 18 mois, et de son père, Israël a, une fois n’est pas coutume, lancé hier des raids dans des colonies. Faisant boire, par la même, à une poignée d’extrémistes juifs l’amère potion généralement administrée, à grandes louches, aux Palestiniens.
Accusé à l’intérieur et à l’extérieur d’accorder une impunité aux auteurs d’attaques contre les Palestiniens, le gouvernement de Benjamin Netanyahu pouvait difficilement faire moins.
Mais l’agitation du moment ne doit pas tromper.
Imaginons que l’appareil judiciaire se mette effectivement en branle, que les auteurs du drame de Douma soient jugés et condamnés. Lourdement. Imaginons tout cela et la publicité qui accompagnera le processus.
Et après ?
Les responsables de la mort du petit Ali ne sont pas seulement deux ou trois colons.
Les responsables de la mort de Ali et de son père sont aussi et surtout ceux qui promeuvent, au plus haut niveau de l’État, une politique colonisatrice. Au premier rang desquels Benjamin Netanyahu qui a fait de l’extension ininterrompue des implantations juives en territoire palestinien son thème principal de campagne, avant les élections de mars dernier. Netanyahu qui a attribué une place et un pouvoir inédits aux colons dans sa coalition gouvernementale. En contrepartie du soutien de ses huit députés, Naftali Bennet, le chef du Foyer juif, a décroché le ministère de l’Éducation et ceux de l’Agriculture et de la Justice pour ses affidés. Trois ministères au cœur de la problématique coloniale. Trois ministères confiés à un parti qui rejette la création d’un État palestinien préconise l’annexion de 60 % de la Cisjordanie (la zone C) déjà sous contrôle exclusif de l’armée israélienne et veut limiter l’autonomie palestinienne dans le reste du territoire…
Les responsables sont tous ceux qui, même s’ils ne promeuvent pas la colonisation, laissent faire et dire.
Car pendant que dans les journaux l’on rapporte les raids et arrestations parmi les colons israéliens, l’annexion par Israël de la zone C continue. Jour après jour.
Le lendemain de l’arrestation de trois extrémistes juifs en lien avec le drame de Douma, les forces armées israéliennes ont rasé la maison et les remises d’une famille palestinienne à Aïn al-Meyteh en Cisjordanie, rapporte l’ONG israélienne B’Tselem. Quelques heures plus tard, le même scénario se répétait à Aïn al-Meyteh, également en Cisjordanie, une communauté régulièrement contrainte de quitter ses terres pour laisser les soldats israéliens s’y entraîner. Les prochains sur la liste des expulsions pourraient être les habitants de Susiya, déjà chassés à deux reprises de chez eux depuis les années 80. Pour justifier une nouvelle tentative de dégager les habitants et de s’approprier leurs terres, Israël a ressorti des archives de l’histoire une loi ottomane datant de 1858…
Aujourd’hui, ce sont des milliers de Palestiniens, résidents de la zone C, qui vivent sous la menace d’une expulsion imminente. En toile de fond de cette politique d’expulsions, les colonies, l’une cherchant à s’accaparer des terres cultivables, l’autre à établir une zone « sécurisée » aux alentours ou à assurer une continuité territoriale entre ses propres avant-postes.
Dans ce contexte, les arrestations, raids et autres effets d’annonces ne sont que de la monnaie de singe visant à acheter le silence de l’opposition israélienne et de la communauté internationale.