Quel est le point commun entre la lutte contre le cancer, l’ours polaire, les personnes disparues, l’eau, le logiciel libre et la femme ? Réponse : ils ont tous leur journée mondiale. Celle de la femme tombe aujourd’hui. On aurait préféré que la femme, à l’instar de l’homme, en soit exemptée, mais la situation ne le permet pas.
Par respect pour celles et ceux qui ont lutté ou luttent depuis des décennies pour les droits de la Libanaise, il faut rappeler que de belles victoires, sur un champ de bataille pourtant bien miné, ont été enregistrées. Il fut un temps où une Libanaise ne pouvait ouvrir un commerce sans l’autorisation de son mari ou témoigner au registre foncier, ce au même titre que les mineurs, les fous, les sourds ou ceux ayant fait l’objet de certaines condamnations pénales.
Mais aujourd’hui, alors que la réalité devient virtuelle, l’intelligence artificielle, le corps 2.0 et l’espace la prochaine destination touristique, la femme libanaise ne bénéficie toujours pas de droits somme toute très basiques.
Des droits comme celui, privilège masculin, de transmettre sa nationalité à ses enfants. Une égalité de traitement, au niveau du statut personnel, quand il s’agit d’héritage, de divorce ou de garde des enfants, serait également urgente. Sans parler de la nécessité de laisser le religieux et la tradition à la porte de la chambre à coucher et d’ouvrir la voie à une criminalisation du viol conjugal.
Mais il y a aussi tout ce champ en dehors du droit.
Mercredi dernier, en prévision de cette journée mondiale de la femme, nous avons fait une petite expérience. Nous avons rassemblé toutes les photos publiées par Dalati et Nohra, l’agence officielle du gouvernement libanais qui couvre l’activité politique locale. Sur ces photos, nous avons cherché les femmes, que ce soit au niveau des activités du gouvernement, du Parlement ou de la scène politique en général. Le gouvernement ne comptant qu’une ministre et la Chambre quatre députées (sur 128 parlementaires), le résultat de cette expérience est à la fois sans surprise et édifiant. Le peu de femmes visibles sur ces photos sont la plupart du temps membres du public ou des médias.
L’on peut regretter, dénoncer, condamner cette situation. L’on doit, ensuite, comprendre les raisons de cette sous-représentation, se mobiliser et s’engager. Les Libanaises, surtout, doivent s’engager. Elles le font déjà admirablement au sein de la société civile. Cela ne suffira pas. Elles devront aussi descendre dans l’arène politique, investir toutes les instances étatiques et travailler le corps libanais de l’intérieur, avec les armes de la politique, pour changer la société.
Dans quelques mois devraient avoir lieu les élections municipales. Pour une fois que des élections sont organisées au Liban, il s’agirait de ne pas laisser passer cette opportunité.