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Personne, pas même ses alliés, ne croit à l’initiative du chef du CPL

 

La situation

Fady NOUN |

Personne, pas même ses alliés (pas même son auteur ?), ne croit à l’initiative politique de Michel Aoun, mais tout le monde fait semblant d’être prêt à l’examiner. Pour mieux la rejeter. Le bloc parlementaire du Changement et de la Réforme a poursuivi hier sa tournée des groupes parlementaires, sans parvenir à briser le cercle vicieux dans lequel tourne le pays.

Comme l’a constaté hier, depuis Paris, Walid Joumblatt, il semble que ce bloc et son chef manquent du réalisme nécessaire pour se rendre compte que le règlement de la crise de la vacance présidentielle n’est pas d’ordre technique ou constitutionnel, mais qu’il obéit à des règles politiques, à un équilibre des pouvoirs que les propositions brouillonnes de Michel Aoun ne peuvent modifier.

En tout état de cause, on a été intrigué hier, dans les milieux politiques, par le fait que Nabih Berry n’a pas reçu la délégation parlementaire aouniste, contrairement à ce que tous les autres blocs ont fait, mais a laissé ce soin à l’un de ses lieutenants, le député Ayoub Hmayed.

Le fait est d’autant plus étonnant que, ce faisant, M. Berry déroge à une recommandation expresse de Hassan Nasrallah, qui avait demandé à ses alliés « d’écouter ce que Michel Aoun a à dire ».

Selon des milieux politiques informés, l’attitude du président de la Chambre s’explique par le fait qu’il ne peut officiellement examiner une proposition reposant fondamentalement sur le refus de Michel Aoun de le reconnaître, personnellement, comme président du Parlement, puisqu’il affirme que ce Parlement a perdu sa légitimité.

Ce refus pourrait aussi être la réponse de M. Berry au boycottage par le bloc aouniste de la séance législative à laquelle il avait appelé.

Quoi qu’il en soit, il semble bien que les propositions constitutionnelles de Michel Aoun indisposent des blocs parlementaires représentatifs de composantes communautaires entières, malgré leur désir de se montrer coopératifs.

Celui qui s’est le mieux exprimé à ce sujet, hier, est Amine Gemayel, qui a affirmé que « les théorises autour de la Constitution ne servent à rien ». Dans les milieux proches du chef du parti Kataëb, on rappelle en particulier que « ce n’est pas en traversant le gué qu’on change de monture » et qu’un changement de régime politique comme celui que propose Michel Aoun ne s’improvise pas. Aussi, Samir Geagea a estimé hier qu’il est « inconcevable » d’amender la Constitution alors que le Liban est sans président.

Pour beaucoup, en effet, ce ne sont pas les propositions de Michel Aoun qui font problème, mais le moment qu’il choisit pour les soumettre. Il va sans dire que certains ont fait le rapprochement entre la tournée des parlementaires et l’anniversaire de l’accord de Doha, conclu en 2008, en vertu duquel fut élu Michel Sleiman, un président centriste. Sachant que Michel Aoun ne rate plus une seule occasion pour jurer qu’on ne l’y reprendra plus et que l’accord de Doha a été « une catastrophe ».

La délégation parlementaire aouniste est attendue aujourd’hui rue Bliss, au bureau de Fouad Siniora. Notons que la rencontre se fait au lendemain de la douzième séance de dialogue, hier, entre le courant du Futur et le Hezbollah.

Et ce n’est pas la moindre des ironies que la venue au Liban de Ali Akbar Velayati, qui s’est félicité publiquement des « points » marqués par le Hezbollah dans le Qalamoun syrien, devant des Libanais qui redoutent que l’aventurisme du Hezbollah ne les conduise à des situations encore plus aliénantes que celles qu’ils vivent, et des mouvement politiques qui désapprouvent clairement l’implication du parti pro-

iranien en Syrie.

Il y a lieu de souligner aussi que cet « étalage d’arrogance » se produit à l’heure même où la connexion syrienne du régime politico-sécuritaire antérieur au départ des troupes syriennes du Liban, en 2005, se voit de plus en plus nettement grâce au déballage auquel donne lieu le procès des assassins de Rafic Hariri.

Un responsable du Vatican

Sur un autre plan, on apprenait hier que le cardinal Dominique Mamberti, préfet du tribunal suprême de la signature apostolique, l’un des proches collaborateurs du pape, est attendu au Liban le 24 mai, à l’invitation de l’archevêque de Beyrouth, Paul Matar. Selon l’agence al-Markaziya, qui annonce cette arrivée, la visite du cardinal Mamberti sera, « du point de vue formel, ecclésiastique », puisqu’il est chargé d’évaluer la situation des tribunaux religieux au Liban », mais qu’elle comprendra aussi un volet politique et spécifiquement présidentiel. Et ces milieux de rappeler que le cardinal Mamberti a été responsable un moment de la secrétairerie d’État du Vatican.