IMLebanon

Poubelle la vie !

Trop occupée à gérer les ego des uns et des autres, la classe politique barbote dans les miasmes des querelles intestines. Aussi, pour rester dans la même matière, rien ne vaut un petit topo sur les déchets dans lesquels ce gouvernement de peu menace de nous engloutir. À la limite, ce n’est même pas un changement de sujet, le passage de la ménagerie politique aux ordures ménagères se faisant en douceur et quasiment dans le même parfum.
Déjà quand on regarde le Liban à partir du ciel, on voit surtout une poubelle de 10 452 km² jetée dans la Méditerranée orientale. Là, parmi les remugles nauséabonds échappés des usines et des pots d’échappement des bahuts 4×4 noirs des mafieux (qui constituent les 85 % du parc automobile local), entre les ordures ménagères, les sacs de nylon jetés dans la mer et les égouts en osmose touchante avec l’eau potable, végète une population mélangée de cobayes accablés, barbotant dans la seule denrée abondante et à portée de tous : la fange. Ça donne envie de voir des cèdres en bulles !
Le plus cocasse est que l’on vient tout juste de découvrir que les roitelets locaux ne veulent plus du tout déguster le mélange de leurs fragrances. Patrons maronites, sunnites, chiites et druzes veulent traiter chacun tout seul ses propres ordures. Ils pourraient bien un jour lointain se mettre d’accord sur l’élection d’un nouveau chef de l’État, la stratégie de défense, les réformes de l’administration, voire un règlement de la question palestinienne, mais mélanger les cacas dans un suprême élan de patriotisme, ça jamais ! À chaque clan ou communauté ses raclures, et les microbes seront bien gardés…
Bref, nous sommes en possession des armes chimiques les moins sophistiquées, mais les plus redoutables. Elles sont comme qui dirait, une émanation naturelle de nous-mêmes et de notre mode de vie.
Adieu décharge de Naamé, seul laboratoire actif de solidarité communautaire, tu nous manqueras ! Voilà sans doute pourquoi les Israéliens ne se sont jamais avisés de la bombarder en profondeur. Les effluves tenaces d’unité nationale qui s’y échapperaient auraient pu les enivrer.