Parallèlement aux tentatives de normaliser les rapports entre les Forces libanaises (FL) et le courant du Futur, troublés depuis la démission-surprise du Premier ministre, Saad Hariri, le 4 novembre dernier, des efforts seraient actuellement déployés pour ramener les relations entre les FL et les Kataëb à la normale.
Si les relations entre ces deux alliés historiques n’ont jamais été exempts de tensions et rivalités, en dépit du fait qu’ils partagent la même vision à l’égard des principaux dossiers stratégiques, le fossé s’est creusé après la signature de l’accord de Meerab entre les FL et le Courant patriotique libre, le 18 janvier 2016. À l’heure où le parti de Samir Geagea se félicitait d’être parvenu à consacrer « la réconciliation interchrétienne tant attendue », le parti de Samy Gemayel mettait en garde contre l’élection de Michel Aoun à la présidence de la République, dans la mesure où elle « précipiterait le pays dans l’orbite d’un axe régional ».
Ainsi, les positions diamétralement opposées de MM. Gemayel et Geagea au sujet de l’élection présidentielle et du cabinet Hariri ont également contribué à la détérioration des rapports entre les partisans des deux formations. Ceux-ci se sont déchaînés sur les réseaux sociaux à plusieurs reprises, envenimant encore plus les rapports entre Saïfi et Meerab.
Aujourd’hui, les positionnements des deux partis sont plus clairs : les FL font toujours partie du cabinet de Saad Hariri, en dépit des menaces de démission lancées à plusieurs reprises par Samir Geagea. De son côté, Samy Gemayel est de plus en plus attaché à son rôle de farouche opposant au gouvernement actuel. Et c’est à partir de ce positionnement qu’il tente de définir ses relations aussi bien avec ses alliés qu’avec ses adversaires.
Si cela explique, pour certains, le désaccord observé à l’heure actuelle entre les deux partis, d’autres insistent sur le caractère stratégique et nécessaire de leur alliance souverainiste pour faire face au Hezbollah et à ses alliés régionaux.
Les FL : pas d’initiative
Conscients de cette réalité, les proches de MM. Gemayel et Geagea manifestent leur volonté de mettre fin à la querelle entre les deux partis, même si cela ne signifie pas un retour à l’alliance entre les deux formations, notamment au sein du 14 Mars.
À la faveur de cette logique, Fady Karam, député FL du Koura, qui planche sur ce dossier, explique à L’Orient-Le Jour que pour le moment, il n’y a pas d’initiative politique entre son parti et celui de Samy Gemayel. « À l’heure actuelle, il s’agit de mettre fin aux échanges venimeux entre partisans Kataëb et FL sur les réseaux sociaux », précise-t-il, faisant état « d’un calme qui prévaut dans les rapports entre Saïfi et Meerab ». « Nous rencontrons nos collègues (Kataëb) au Parlement pour échanger des idées », ajoute-t-il.
Tentant d’expliquer les raisons du conflit, M. Karam souligne que certaines déclarations émises par des cadres des deux partis ont perturbé les rapports entre eux. Il ajoute aussi la position Kataëb vis-à vis de l’accord de Meerab.
Se voulant optimiste, le député du Koura insiste sur l’attachement des FL aux relations traditionnelles et stratégiques qu’elles entretiennent avec les Kataëb, indiquant, toutefois, qu’ « il est encore très tôt pour parler d’une rencontre entre Samir Geagea et Samy Gemayel ».
Les Kataëb : l’opposition
La même prudence est de mise du côté Kataëb, où l’on insiste sur le fait que, pour l’heure, Saïfi est dans l’opposition et Meerab au pouvoir. « Nous avons une vision commune concernant les affaires nationales et le conflit entre nous est dû au compromis politique, qu’ils ont avalisé et que nous avons rejeté », explique ainsi le député Samer Saadé, en charge de ce dossier côté Kataëb, dans une déclaration à la presse. « Nous payons le prix de notre positionnement depuis un an et demi. Nous campons sur nos positions, qui sont bien connues », ajoute M. Saadé.
« Il n’y a pas d’initiative politique pour l’heure. Celle-ci doit émaner soit du Dr Geagea, soit de cheikh Samy. Tant que nous ne sommes pas chargés d’une telle mission, M. Karam et moi-même, nous ne pouvons rien faire », souligne-t-il.
Cependant, si la démarche des deux côtés vise pour l’instant à limiter la portée des efforts entrepris à des « rencontres pour échanger des idées et calmer le jeu », le timing de l’initiative pousse à croire qu’elle s’inscrit dans la perspective des législatives de mai 2018, notamment à l’heure où il est largement question de l’éventualité d’une vaste coalition entre les formations au pouvoir dont Meerab pourrait se retrouver exclu.