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Salamé : Les salaires des députés du Hezbollah ne seront pas visés par les sanctions US

Le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, a déclaré hier dans un entretien diffusé dans le programme Kalam al-Nass de la chaîne de télévision LBCI, qu’« une nouvelle circulaire sera émise la semaine prochaine qui (…) imposera aux banques libanaises de se conformer aux décrets d’application de (la loi américaine sanctionnant les activités de financement du Hezbollah). Nous estimons qu’il n’y a pas d’autres alternatives (…) puisqu’il nous faut protéger le système bancaire, qui vit grâce aux échanges avec les banques correspondantes ».
Suite à l’adoption du Hezbollah International Financing Prevention Act of 2015, par le Congrès américain le 16 décembre dernier qui étend les sanctions conte le parti chiite – classé comme groupe terroriste en 1995 par les États-Unis –, le Bureau de contrôle des avoirs étrangers (Ofac) du département du Trésor américain a publié, le 15 avril, ses premières modalités d’application, dont une liste de 99 noms de personnes physiques ou morales faisant l’objet de sanctions.
Après avoir rappelé que cette loi s’applique « à l’échelle mondiale et concerne toutes les devises y compris la livre libanaise », M. Salamé a indiqué qu’il n’acceptera pas « que des banques qui n’appliquent pas la loi mettent tout le système bancaire libanais en danger ». En cas de manquement éventuel, « la BDL (saisira) la Commission de contrôle bancaire (et pourra) envisager dans ce genre de situation de changer le directeur de cette banque (…) », a-t-il ajouté.

 

« Prévenir tout risque d’exclusion »
Néanmoins, et pour éviter que par crainte de sanctions, les banques appliquent de manière abusive ces nouvelles directives, « des critères précis concernant l’application de cette loi ont été mis en place et précisent que les comptes qui doivent être fermés sont ceux affiliés au Hezbollah, en tant qu’institution, et ceux affiliés aux noms figurant sur la liste de l’Ofac, ni plus ni moins », a souligné M. Salamé. « La circulaire précise aussi que les banques sont tenues, en cas de fermeture (ou de refus d’ouverture) d’un compte bancaire, de transmettre à la BDL les raisons justifiant cette (décision), ainsi que l’identité du détenteur de ce compte », a-t-il ensuite expliqué, avant d’ajouter que la BDL « a prévu ces conditions pour assurer à tous les Libanais le droit de bénéficier du système bancaire (…) et prévenir tout risque d’exclusion d’une communauté du système bancaire ».
S’agissant des conséquences de l’application de cette loi sur les modalités de paiement des salaires des députés et fonctionnaires affiliés au Hezbollah, M. Salamé a affirmé que « les salaires n’entraient pas dans le cadre des sanctions, car il ne s’agit pas d’opérations “significatives” », avant de préciser « que ce n’est pas le montant, mais la nature et la fréquence des opérations vers une même destination qui constituent une opération “significative”. » Il a néanmoins ajouté : « Si ces salaires sont utilisés pour d’autres motifs (que la rémunération de leur bénéficiaire), à ce moment-là, ils sont soumis aux sanctions. » Concernant enfin les élus du Hezbollah qui assument des fonctions publiques et doivent donc gérer des fonds publics, « la BDL est en mesure de déterminer la nature des opérations qu’ils effectuent, et si elles entrent bien dans le cadre de leurs missions auprès de l’Etat libanais », a indiqué M. Salamé.
Interrogé sur les effets des nouvelles normes internationales de lutte contre le blanchiment d’argent ou l’évasion fiscale sur le secret bancaire, M. Salamé a assuré que « le secret bancaire libanais n’est pas en danger. Nous refusons simplement qu’il serve à l’évasion fiscale ». En novembre 2015, le Parlement libanais avait adapté son arsenal législatif en la matière en votant quatre lois, dont celle permettant à un pays tiers de demander la levée du secret bancaire concernant une personne physique ou morale soupçonnée d’évasion fiscale. « L’échange d’informations ne pourra pas concerner les clients qui ont des comptes bancaires uniquement au Liban. Mais plutôt, les clients qui ont à la fois un compte au Liban et un autre dans un pays tiers qui demande un échange d’informations », a affirmé M. Salamé. Il a en outre démenti les informations publiées le 16 avril par le quotidien Le Monde selon lesquelles le Liban est menacé de figurer – avec le Panama et le Vanuatu – sur une future liste noire des paradis fiscaux devant être établie en juillet par l’OCDE, notamment en raison de sa non-adhésion au nouveau standard d’échange automatique d’informations adopté en 2014 par le G20.