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Six facteurs pourraient faciliter un déblocage de la présidentielle

L’inqualifiable comportement des partisans du président Bachar el-Assad, encadrés par leurs alliés libanais du Hezbollah, qui ont paralysé hier durant toute la matinée et jusqu’en début d’après-midi les régions de Hazmieh, de Baabda et de Yarzé, sous prétexte de participation à « l’élection » présidentielle syrienne, n’est pas fortuit, affirment certains observateurs avertis. Il s’agissait d’un acte de provocation, non pas gratuit, mais savamment orchestré et réfléchi. L’objectif : se livrer à un étalage de forces de manière à brandir un instrument de chantage et d’intimidation à la face des décideurs locaux et régionaux qui sont dans le camp adverse au tandem irano-syrien. Un tel chantage, à caractère milicien, a en toute vraisemblance l’échéance présidentielle (au Liban) comme toile de fond. L’axe Téhéran-Damas, par le biais du Hezbollah, chercherait en effet à faire monter les enchères sur le terrain libanais, afin d’accroître sa quote-part dans l’élection présidentielle au Liban.
En tout état de cause, une source diplomatique étrangère a exprimé la crainte que la vacance à la présidence de la République libanaise soit appelée à se prolonger pour deux raisons principales : l’absence d’accord entre les pôles maronites sur un candidat rassembleur ; et l’attitude des pays étrangers qui concentrent actuellement leurs efforts sur les dossiers régionaux en soulignant que la situation au Liban n’est pas une priorité pour eux dans le contexte présent.
Sur le plan local, les milieux politiques estiment que la séance parlementaire fixée au 9 juin prochain en vue de tenter d’élire un nouveau président de la République n’aboutira à aucun résultat. Conscients de la complexité de la situation, les milieux en question soulignent que le déblocage au niveau de l’échéance présidentielle pourrait être la conséquence directe de l’un ou de plusieurs des six facteurs suivants :
– La décision des quatre grands pôles maronites de se retirer de la course et d’accepter de jouer un rôle de grand électeur afin d’aboutir à une entente autour d’un candidat qui bénéficierait de l’aval des principales factions locales. Des démarches seraient en cours auprès du leader des Forces libanaises, Samir Geagea, et du chef du Courant patriotique libre, le général Michel Aoun, afin de les convaincre de s’engager sur cette voie.
– L’effondrement du plan sécuritaire mis en place par le gouvernement de Tammam Salam et le retour aux attentats à la voiture piégée ou aux accrochages à Tripoli ou d’autres régions du pays, avec tout ce que cela implique comme accroissement de la tension entre sunnites et chiites.
– L’extension du vide institutionnel au Parlement et même au gouvernement. Cette vacance au niveau des institutions constitutionnelles pourrait aussi relancer les velléités de refondation du système politique en place, ce qui signifierait le torpillage de l’accord de Taëf auquel restent attachées nombre d’instances locales et internationales en raison du fait qu’il est fondé sur la parité entre chrétiens et musulmans en termes de partage du pouvoir.
– La conviction que pourraient acquérir les décideurs arabes et étrangers, selon laquelle une prolongation de la vacance au niveau de la magistrature suprême pourrait avoir de graves conséquences sur les dossiers de la région et sur les efforts déployés au plus haut niveau afin d’aboutir à un règlement de ces dossiers. Ces décideurs pourraient ainsi aboutir à la conclusion que le règlement de la crise présidentielle au Liban constitue le prélude à une percée à l’échelle régionale.
– La concrétisation, dans les faits, de la détente entre l’Arabie saoudite et la République islamique iranienne, par le biais de la visite de l’ancien président iranien Ali Rafsandjani et du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Jawad Zarif, à Djeddah afin d’entamer un dialogue sérieux entre les deux pays. Un tel dialogue porterait, à l’évidence, sur la situation sur la scène libanaise, ce qui pourrait se répercuter sur le dossier de la présidentielle.
– Une initiative du Vatican, en coopération avec la Russie, afin de sauver la présidence chrétienne au Liban, compte tenu de l’importance symbolique que représente pour l’ensemble des chrétiens d’Orient la présence d’un président chrétien au Liban, qui est le seul président chrétien de l’ensemble du monde arabe et islamique.
Tels sont ainsi les cas de figure qui pourraient accélérer l’élection d’un nouveau chef de l’État. Il reste que les récentes déclarations du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, et du chef du Courant patriotique libre, le général Michel Aoun, tendent à prouver que les principales composantes du 8 Mars ne semblent pas très pressées à faciliter un déblocage au niveau de la présidentielle. Le Hezbollah pourrait en effet avoir pour objectif dans l’étape actuelle de maintenir le Liban dans un état de crise permanente, notamment sous l’angle de la présidentielle, afin de permettre au pouvoir des mollahs à Téhéran d’utiliser cette carte libanaise dans ses négociations avec le royaume wahhabite. Si tant est que ces négociations soient amorcées réellement à plus ou moins brève échéance.